Dossier

2019 en 50 albums

par la rédaction, le 14 janvier 2020

#30

BRUTAAL

Zwangere Guy

On n'aurait pas imaginé que le rappeur bruxellois allait terminer l'année 2019 en boulet de canon, en donnant un successeur à Wie Is Guy? même pas dix mois après sa sortie. Mais on aurait encore moins cru qu'il serait capable de faire aussi bien, voire mieux, avec BRUTAAL. Alors 2019 se terminera sur un disque qui, plus que tout ce qu'il a produit à ce jour, renvoie à ses influences passées et actuelles (on le savait très fan de Mobb Deep, on lui découvre ici une passion pour la clique Griselda) et à son sens de la famille total. Et si Wie Is Guy? était un disque joyeux malgré quelques titres portant les stigmates d'une jeunesse difficile, BRUTAAL laisse surtout parler le côté sombre de sa force, celle qui prend sa source dans le caniveau.

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#29

Cairn

Mizmor

Pensées comme une "exploration de l’absurdité de la vie", ces 57 minutes de black metal cathartique et cataclysmique sont une nouvelle fois l’occasion pour Mizmor de dégueuler sa bile à travers la quête d’un homme se demandant s’il doit accepter l’absurdité de l’existence ou simplement mettre fin à ses jours. Le programme n’est pas réjouissant, et la musique l’est encore moins, oscillant entre longues complaintes agonisantes et cavalcades furieuses dont la seule issue semble être le gouffre duquel on finira bien par se jeter, avec à chaque fois des renvois plus ou moins discrets aux influences doom d’un Mizmor qui semble avoir autant sa place dans notre monde que JuL au Hellfest. Expérimental, exigeant, mais surtout essentiel.

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#28

Zandoli

Charlotte Adigéry

Épaulée par un fidèle de la maison DEEWEE (Bolis Pupul) tout acquis à sa cause, Charlotte Adigéry brille sur un EP qui nous rappelle la démarche de son compatriote Baloji l'année dernière sur 137 Avenue Kaniama : il y a dans cette manière de déterrer ses racines caribéennes une volonté de respect et une absence d'opportunisme qu'on se doit de saluer. Là où c'est le rap qui était dans l'ADN de Baloji, c'est le r&b et la musique électronique qui guident le métissage de la paire Adigéry / Pupul pour un résultat qui, quand il ne revendique pas sa singularité, renvoie à l'élégance intemporelle d'une Robyn.

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#27

Birth of Violence

Chelsea Wolfe

Oubliez les arrangements métalliques qui enrobaient Abyss et Hiss Spun. C’est accompagnée de sa guitare acoustique que Chelsea Wolfe terrasse aujourd’hui sa timidité maladive. Birth of Violence alterne entre chansons sombres toutes en retenue et incursions décidées dans des univers plus sophistiqués pour s’achever sur une minute de bruits d’orage, comme pour nous rappeler que le soleil et la lumière du jour n’ont toujours pas leur place dans la discographie de celle qui est adulée des metalheads les plus extrêmes que compte la planète.

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#26

Jaime

Brittany Howard

La chanteuse d’Alabama Shakes a eu une vie plutôt merdique. Est-ce suffisant pour avoir de quoi raconter sur un disque entier ? Honnêtement, Howard se fout de notre pitié et ne saurait d’ailleurs pas quoi en faire. S’il a toujours traversé ses textes d’une manière ou d’une autre, son passé constitue la chair de son premier album solo, créant ainsi l’occasion d’en explorer toutes les aspérités, sans rancoeur et selon ses propres termes. Jaime est une opération minutieuse qui implique de retirer les aiguilles une à une et de laisser filtrer la lumière à travers la passoire. Un petit miracle d’alchimie qui consiste à transformer la merde en or.

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#25

All My Heroes Are Cornballs

JPEGMAFIA

Pas simple de revenir d’une année sur l’autre après un disque aussi fou que celui de l’an passé. Condamné à devoir re-choquer en 2019, le phénomène JPEGMAFIA aurait pu être confronté à son propre succès et quitter lentement la face alternative du hip-hop. Sur All My Heroes Are Cornball, il n’en est rien. Malgré un deuxième album en deux ans et des dizaines de concerts survitaminés dans le monde entier, Barrington Hendricks s’est permis le culot de pondre un album peut-être moins étonnant, mais riche et très différent du précédent. Plutôt que d’y voir un album de la consécration, après lequel il pourra se reposer, connaissant le bonhomme, il vaut mieux y voir l’horizon d’une nouvelle surprise à venir.

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#24

I

Föllakzoid

Elle est loin l’époque où il était encore tentant de réduire Föllakzoid au statut de succursale latino-américaine du revival space rock. Désormais resserré dans un format duo, le groupe chilien explore de nouveaux territoires, quelque part entre kraut rock spatial, electro minimaliste et montées en régime qui emmènent aux frontières de la house. Le résultat? Une musique totale, une heure de transe absolue.

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#23

Serfs Up

Fat White Family

Oui, Serfs Up! est un album de pop. De la pure à 98%, à peine coupée à la cendre de clope roulée. Vous exigiez de l’ampli en fusion, des refrains crasseux, des traces de vomi et des fesses à l’air ? Vous aurez droit à de la flûte, des violons, de la boîte à rythmes, des chœurs vaguement grégoriens et même une percée d’auto-tune. Pourtant, aucun de leurs partis pris, aussi incongrus et divers qu’ils puissent sonner, ne fragilise la cohérence du projet. Serfs Up! ne tourne pas le dos à ses prédécesseurs, il se donne juste les moyens d’explorer ce que le groupe a probablement toujours planqué dans un recoin de sa tête.

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#22

Fly or Die II

Jaimie Branch

Grande architecte du chaos, qu'elle utilise en permanence à son avantage, Jaimie Branch échafaude de fragiles cathédrales, avance ses pions sans jamais dévoiler son jeu, fuyant comme la peste les structures pré-établies. Il ressort de cette approche héritée de son amour pour le free jazz et les musiques expérimentales un disque désarçonnant, éprouvant parfois aussi, et qui déploie ses charmes avec la prévisibilité d'un bulletin météo à 15 jours. Peut-être la plus belle réussite du label International Anthem en 2019. Pourtant, avec des sorties de Resavoir, Angel Bat Dawid,ou le Damon Locks Black Monument Ensemble, il y avait de la concurrence chez le label le plus passionnant du jazz actuellement.

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#21

Offworld

Special Request

Paul Woolford aura presque réussi son pari fou : pondre quatre albums en un an. Il s'est arrête à trois, le dernier devant arriver très prochainement. Plus fou encore, ceux-ci combinent variété et qualité, explorant toutes les facettes d’un producteur fondu de culture rave, de drum’n’bass, d’IDM et de techno. Mais parce qu’il a bien fallu en choisir un pour ce classement de fin d’année, ce sera Offworld, parce qu’il fait partie de ces disques capables de nous faire clubber avec une larmichette au coin de l'œil, avec ses claviers façon Mike Paradinas, ses lignes de basses qui font immanquablement remuer les guiboles, ses phases ravey, et ses montées qui semblent ne jamais vouloir s'arrêter. Une fusion plus dangereuse que le mariage Bayer-Monsanto.

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