Rook
Shearwater
Winged Life était déjà un excellent album. Palo Santo avait encore placé la barre un peu plus haut. Voici que débarque Rook, cinquième album studio des Américains de Shearwater, et les attentes sont évidemment énormes. Signé sur Matador, le groupe emmené par Jonathan Meiburg vole aujourd’hui de ses propres ailes, débarrassé du parallélisme étouffant jadis fait avec Okkervil River, formation au sein de laquelle Meiburg collaborait avec son grand ami (et accessoirement songwriter exceptionnel) Will Sheff. Et évidemment, vu la trajectoire impeccable empruntée par ces formations ces dernières années, d’aucuns attendent du groupe texan un disque qui traduira tant l’émancipation d’un songwriting bouleversant que la maturation d'idées en constante évolution depuis que le groupe a fait son apparition en 1999.
Jusqu’à présent, la production des albums de Shearwater n’avait pu trouver totalement grâce aux yeux de Jonathan Meiburg. Lors de la signature du groupe sur le label Matador, Meiburg en avait d’ailleurs profité pour rééditer Palo Santo en l’agrémentant de cinq nouveaux titres enregistrés sous la houlette du producteur Matthew Barnhart, qu’on avait déjà aperçu aux côtés de Spoon, St. Vincent ou Adem. Visiblement satisfait du travail fourni, les deux hommes ont donc décidé de prolonger leur alliance sur Rook, album synonyme d’une embellie sonore évidente. Plus affinée et percutante, la production de Matthew Barnhart permet au groupe tout entier d’exploiter pleinement son potentiel et donner davantage de relief à ses compositions, le tout sous la surveillance bienveillante d’un Jonathan Meiburg qui éclabousse Rook de son immense talent d’écriture et de sa voix émouvante. Monument d’intensité et d’émotion, ce nouvel opus prend son envol dès « On the Death of the Waters », ballade poignante déchiquetée par une décharge électrique, pour rapidement atteindre des sommets qu’il ne quittera jamais. Entouré d’un groupe tout acquis à sa cause, qui enveloppe sa voix pure d’arrangements en parfaite adéquation avec les décharges émotionnelles de leur leader, Jonathan Meiburg accouche de ce disque abouti et entier de folk-rock dont il devait probablement rêver depuis si longtemps. Inutile de vous dire que l’on tient là le meilleur album du groupe à ce jour, mais également l’un des plus beaux de 2008.