Pete Seeger, ménestrel du Nouveau Monde, est mort
Puriste du folk, partisan du partage des richesses, défenseur d'un certain isolationnisme respectueux, Pete Seeger aura été, pendant 94 ans, témoin d'un curieux signe d'inversion projeté sur sa vie. Alors qu'il jure qu'aucune électricité ne passera jamais par son banjo, il file naïvement l'une de ses compositions au groupe The Byrds ("Turn Turn Turn") qui l'utilise pour brancher le folk sur courant alternatif pour l'éternité. Dégoûté, Pete décide de gratter ses cordes en chantant des petites mélodies cubaines aux profondes racines. Il s'étrangle quand il voit arriver à son domicile des coffres remplis de billets verts grâce aux ventes de "Guantanamera" alors que Joseíto Fernandez et José Monti, les auteurs originaux, n'ont jamais vu l'ombre d'un peso. Seeger consacre alors son temps à jouer à l'archéologue d'une musique qui formerait le cœur humble de l'Amérique; des années à fouiller dans des archives et à interroger des radoteurs à mémoire aux quatre coins de son pays pour au final voir son travail de compilation être volé et sublimé dans un disque miraculeux, le We Shall Overcome de Bruce Springsteen, alors que ce dernier est l'incarnation marmoréenne d'une Amérique messianique rayonnant pour l'univers tout entier. Life is a bitch and then you die, Peter! Il reste quand même des pensées pleines d'admiration pour un type simple et honnête qui aura donné sa vie à la musique et à ses prochains, jusqu'à en claquer.