MC Solaar sortira son huitième disque en novembre, mais est-ce que ça servira à quelque chose de l'écouter?
Si l'on regarde la timeline du rap français en 2017, on se dit que c'est devenu très dur d'y avoir de l'âge. Parmi les exemples qu'on se plaît a retenir, il y a Oxmo Puccino qui n'en a plus rien à foutre et qui se déguise en dictateur malien dans des clips de -M-, ou Don Choa qui endosse un cosplay Philippe Etchebest pour clipper le moins bon titre de son dernier EP (c'était un peu gênant et, comme il n'y a pas de hasard, ça avait été teasé dans le Planet Rap de Big Flo & Oli). Heureusement, de l'autre côté du rivage, on trouve encore Le Rat Luciano qui enchaîne les titres avec Jul et les rookies des quartiers nords, et même si ça ne nous rendra pas la suite de Mode De Vie - Béton Style, on se dit que c'est loin d'être mauvais.
Quant à MC Solaar, ça faisait a peu près une décennie qu'il avait disparu de nos radars. La seule façon de le croiser, c'était en regardant les Enfoirés chez qui il endosse le costume de JJG du rap jeu français qu'il est devenu. Dix ans de silence qui se sont néanmoins terminés vendredi dernier, avec la sortie de "Sonotone", le premier extrait de son huitième album Géopoétique qui sortira début novembre prochain.
Bon, inutile de faire durer le suspens: si le texte est correctement exécuté, on sait dès les premières secondes que ce premier titre n'est pas bon, pas très inspiré, et que tout y sonne franchement daté. Mais ça on s'en doutait un peu puisque tout était comme ça sur son précédent disque. Et bon, plus rien ne fut plus vraiment comme avant à partir du moment où il a accepté cette drôle d'idée de faire du raggamuffin (sic) sur le thème de Rabbi Jacob.
Alors finalement, une question se pose: au lieu de s'acharner à vouloir revenir sur le devant de la scène, (surtout que ça n'a pas l'air d'intéresser grand monde), est-ce que MC Solaar ne ferait-il finalement pas mieux d'opter pour le syndrome Première Consultation ? En d'autres termes, d'en finir avec la guerre qui dure depuis bientôt trente ans et l'oppose à Polygram pour enfin permettre la réédition de ses quatre premiers disques ?
Car en tirant un trait sur Qui sème le vent récolte le tempo, Paradisiaque, MC Solaar et surtout l'immense Prose Combat, c'est sur un beau pan du rap français qu'on tire un trait. Et à une époque où, lorsque que tu ne te streames pas tu n'existes pas, on se dit que Claude MC est en train de se tirer une sacrée balle dans le pied en renonçant a la mise en ligne de son catalogue. Une plaie qui ne cesse de s'agrandir à mesure qu'il s'acharne à sortir des disques de plus en plus quelconques, malgré un Cinquième As complètement sous-estimé au début des années 2000.
Ces rééditions nous offriraient, en plus de ça, un plaisir rare: celui de permettre aux faux nostalgiques, ceux qui défendent bec et ongle le rappeur en relevant "la qualité de ses rimes" ou "le fait qu'il ne parle pas de thunes et de gros culs" (comprendre "pas comme Booba") de porter une oreille neuve sur une musique qu'ils n'ont plus entendue depuis bientôt deux décennies. De leur rappeler qu'en dépit de sa plume, Claude MC n'a jamais su faire de refrains, et que mine de rien ce manque de musicalité plombe l'écoute d'un album dans son intégralité. Bref, ces rééditions permettraient aux gens d'enfin comprendre que le rap c'était pas forcément mieux avant.
Vous l'aurez compris: on estime trop Solaar pour faire autre chose que de regarder dans le rétroviseur, pour mieux admettre que l'on attend pas grand chose de Géopolitique. En fait, on préfère employer toute notre énergie à ce seul et unique message: Claude, libère Prose Combat. Et ce n'est certainement pas Tiers Monde qui viendra nous contredire.