Liam Gallagher pose aux côtés d’Eric Cantona pour un message bien plus fort qu’il n’y paraît
Ce vendredi 31 janvier 2020, Liam Gallagher a lâché le clip de son single « Once » dans lequel, avec grand étonnement, Eric Cantona apparaît comme le héros – ou plutôt antihéros. Dès sa publication, les réactions ont été unanimes : deux farouches représentants des clubs mancuniens ennemis se sont unis, et ça, c’est beau.
Certains ont donc cherché les raisons de cette union. Les uns disent que le king Cantona admire en réalité la musique de l’artiste, quand d’autres ont trouvé que ce dernier ne s’attacherait qu’aux icônes réellement rock, en voie de disparition dans ce monde selon Gallagher – si ce n’est le célèbre attaquant français. Respect mutuel. C’est beau, une nouvelle fois.
Reste que ces raisons tendent à réduire un coup médiatique bien plus profond qu’il n’y paraît. Avec beaucoup d’émotions, « Once » vient prendre – 25 ans plus tard – le contre-pied du tube « Live Forever », dont Oasis soufflait le refrain You and I are gonna live forever, phrase qui pique un peu aujourd’hui à regarder la destinée des deux frères. Si ce morceau annonçait une postérité certaine, le temps nous a démontré, d’une part, que l’union fraternelle s’est brisée avec éclat quand, d’autre part, la célébrité du groupe allait peu à peu s’effriter au fil des générations.
Restons 25 ans en arrière : le 25 janvier 1995, Eric Cantona adressait un iconique coup de pied à l’un des spectateurs présents au stade de Crystal Palace. L’homme venait d’hurler « enculé de bâtard de Français ». Si cette frasque participe à la légende, elle allait marquer le début du déclin, celui d’un homme fait pour le football, mais dont la trop grande passion le torturait au point de lui faire finalement quitter le navire. Avant de partir, King Eric faisait un retour de suspension illustre, col relevé, dans un Old Trafford couvert de drapeaux Bleu-Blanc-Rouge.
Avec « Once », nos deux héros déchus viennent nous dire que le pouvoir ne dure pas, que certaines forces du monde ne peuvent surgir qu’une seule fois : être roi un lendemain de fête – comme le montre le clip – vous laisse en définitive seul, avec vous-même et votre passé, pantois dans un slibard au milieu des déchets de vie. Liam, ce maître trublion insoumis, comme serviteur malpropre du roi, souverain ironique du camp ennemi – notons au passage qu’avant de percer, Liam aurait officié comme voiturier pour les Reds Devils. Rien ne dure donc, malheureusement.
Pas même ce clip, dont les dernières images couvrent le domaine d’un roi sur le départ, avec quelques notes de piano en fond, qui ne sont pas sans évoquer les manières de John Lennon. Or, cette maison – celle du clip – s’avère être justement celle que l’ancien Beatles a utilisée pour illustrer son titre "Imagine", avec lequel il concluait I hope someday you'll join us and the world will live as one.
Ce 31 janvier 2020, le Royaume-Uni proclamait sa sortie et sa division de l’Union européenne : le roi s’en va. Une scission vécue comme un drame par le milieu artistique, rappelons-le, puisque celui-ci ne va plus pouvoir se mouvoir ou vivre aussi aisément qu’au temps de l’union – que les contraintes soient économiques, administratives ou autres. « Once » vient donc nous rappeler que les choses ne durent pas, et son clip, avec tristesse et ironie, que l’un des plus beaux seigneurs de la religion anglaise – le football – avait pourtant apporté sa couronne d’outre-Manche.
But oh, l remember how you used to shine back then
You went down so easy like a glass of wine, my friend
When the dawn came up, you felt so inspired to do it again
But it turns out you only get to do it once