Dans l'intimité de la Red Bull Music Academy de Paris
Suite aux attentats de Paris, le programme de la Red Bull Music Academy a été logiquement chamboulé et de très nombreux évènements ont été annulés. Cependant, parce que la vie continue, la soirée de clôture de ce vendredi 27/1 à la Gaîté Lyrique a été maintenue. On en profite donc pour publier notre dossier sur la RBMA, qui s’articule autour d’une visite de notre équipe dans les locaux de cette machine très bien huilée, qui a pris ses quartiers à Paname après des éditions à Tokyo, Berlin, New York, Londres ou Rome. Un reportage entre étoiles plein les yeux, interrogations légitimes et entretiens éclairants.
Red Bull Music Academy… Un nom à la fois hyper commercial et très aguicheur. Le public parisien connait surtout les événements placardés en masse dans les magazines et dans le métro, apprécie la programmation variée et pointue, touchant à la musique électronique bien sûr, mais aussi au métal, au hip-hop, à la musique expérimentale ou world. Mais l’Academy reste pourtant une énigme. Que représente-t-elle ? Dix-sept éditions ont eu lieu, accueillant à chaque fois des participants du monde entier triés sur le volet, des jeunes producteurs et musiciens bénéficiant de deux semaines intensives où ils rencontrent des artistes de renom, jouent sur scène à leurs côtés le soir et se côtoient le jour pour laisser libre cours à leur imagination dans un esprit de saine émulation.
Afin de mieux définir les enjeux et les valeurs que défend et promeut la RBMA, afin de comprendre l’organisation de cette OPA musicale d’un mois sur l’espace culturel parisien, nous avons souhaité rentrer en immersion, une journée entière, mélangés façon Splinter Cell aux participants de cette édition 2015.
Rendez-vous est pris pour le lundi 2 novembre, 11h45 à la Gaîté Lyrique. Au programme de cette journée, visite des locaux, conférence entre les participants de la RBMA et Nicolas Godin, déjeuner et interviews de deux acteurs au cœur du projet, l’artiste participant Keight et Guillaume Sorge, directeur artistique de la RBMA Paris.
Accompagnés d’une attachée de presse, nous explorons les espaces dédiés. D’habitude planqués dans des locaux accolés à la Galerie 12Mail (autre propriété de Red Bull), les équipes France et Worldwide de communication, programmation, production, pôle photo et vidéo sont tous réunis de façon éphémère dans un seul et même endroit. Un vrai déménagement éphémère pour être efficace et vivre la RBMA le plus intensément possible. Ensuite, découverte du lieu où les participants petit-déjeunent, déjeunent, prennent l’apéro, dinent. Les boissons et denrées alimentaires sont fort savoureuses, équilibrées et servies en abondance. Les académiciens et tous ceux travaillant autour sont choyés, c’est une évidence ! Mais la claque viendra ensuite lorsque se baladant dans le plus bas des deux étages affectés, nous nous trouvâmes surpris autour des 8 studios installés spécialement pour eux, avec du matériel dernier cri et un accès 24h/24. Les participants bénéficiant d’un pass all-access pour la Gaîté ainsi que tous les événements organisés dans le cadre de la RBMA sont aussi tous logés dans un bel hôtel en face de la Gaîté Lyrique. Chouchoutés qu’on vous dit.
On a tout de même l’impression d’être dans le QG d’une super-production à l’américaine, une fourmilière où chacun tient son rôle et se croise en continu, en anglais ou en français. Télés, studios, caméras, expo photo, signalétique… tout est mis en place par et pour la RBMA. C’est beau, c’est propre et très intelligemment agencé, mais il nous manque encore l’aspect humain et artistique, but s’il en est de capturer l’esprit de la RBMA, que nous espérons enfin découvrir pendant le reste de la journée. Marie nous amène dans la « lecture room », la salle vidéo où se déroulera la « leçon » de Nicolas Godin, un des deux piliers du mythique groupe AIR, vitrine de la French Touch.
Confortablement installés, des participants au look plus ou moins étudié arrivent petit à petit. Les caméras sont installées aux quatre coins de la salle, tout comme les frigos remplis de la boisson énergisante. Nicolas Godin arrive, se fait rapidement briefer et prend place sur le grand canapé. Un modérateur dirigera la rencontre avec des questions sur le processus de création de Nicolas Godin, en reprenant de manière chronologique son parcours, entrecoupé d’extraits musicaux et vidéo. Le tout en anglais, pour que chacun puisse comprendre (les participants viennent des quatre coins du globe), mais aussi pour que la lecture puisse être plus largement diffusée sur internet. On est chez Red Bull quand même.
« Modular Mix » nous berce d’entrée comme une introduction à sa carrière (saviez-vous qu’il faisait là référence à Le Corbusier et à ses années d’études en architecture ?). Nous épluchons alors petit à petit la vie de Nicolas Godin et découvrons, grâce à ses confidences, la vie d’un artiste vue de l’intérieur, se réalisant durant la période florissante de la French Touch au début des années 90. Un récit dans lequel se glissent des conseils techniques aux producteurs en herbe. Tout y passe : ses débuts sur des consoles 8 pistes, les soucis d’une musique down-tempo et l’importance de la setlist pour le live, le stress des enregistrements dans les studios Abbey Road ou son amour pour les Beatles et la basse. Les anecdotes accompagnant la création de titres comme « How Does It Make You Feel » et « La Femme d’Argent » sont d’autant plus appréciables que l’écoute de ces extraits se fait de façon quasi-religieuse, les participants fermant les yeux pour certains, tapant des mains et des pieds pour d’autres, ou ouvrant plus ou moins discrètement leur canette, laissant doucement embaumer la salle d’une odeur sucrée que tout le monde connait.
Au son de « Playground Love », la rencontre aborde son travail avec le cinéma sur Virgin Suicides puis Lost in Translation (et l’inspiration du Japon pour Pocket Symphony) et le projet autour du Voyage dans la Lune de Georges Méliès. Nicolas Godin explique les conditions très particulières que demandent une production cinématographique (délais très courts, flexibilité exigée), tout en faisant comprendre qu’il était nécessaire pour lui d’avoir ces commandes, considérées comme des missions, celles qui donnent des idées nouvelles et qui leur donnent envie, à lui et son acolyte, de reprendre Air.
Les questions sont ensuite ouvertes aux participant(e)s. Le respect et les remerciements des académiciens à l’égard du Versaillais transpirent dans chaque question, précise et à la résonnance particulière comme à une interrogation profonde du jeune artiste qui doute. Une lui demandera s’il se souvient du « jour où tout a basculé ». Fragile, Nicolas explique qu’il considérait avant ne faire qu’une pâle copie de ce qui existait déjà et qu’un jour, seul dans son studio à Montmartre, il se surprend à associer 3 instruments ensemble et à ressentir à ce moment-là la naissance du « Air Sound ». Tout est affaire de combinaisons selon lui. On abordera même Georges Delerue, son rapport avec la musique de Bach et Steve Reich, l’héritage qu’il espère laisser. La rencontre se conclut sur cette phrase : « A good wine is better than my records ».
Après s’être rempli la panse, on passe à la raison principale de notre venue : les entretiens de ceux qui vivent la RBMA avec le cœur (Keight) et avec la tête (Guillaume Sorge).
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Interview : Keight
Keight est un tout jeune producteur. Il a 18 ans, vient de Paris, ne compose que depuis quelques années et a la chance d’avoir été sélectionné pour la RBMA. Il rencontre ses idoles, que ce soit lors des lectures, au studio ou même parmi les participants. Rencontre.
Alors ? Ce concert avec Nosaj Thing ? Comment tu t’es retrouvé à jouer en même temps que lui ?
C’était mortel, j’étais le dernier participant à jouer, la foule était en folie ! Quand j’ai commencé à connaître les détails des events RBMA et que j’ai vu qu’il y avait Hudson Mohawke, ou le line-up avec Nosaj Thing, j’ai fait « ah ouais, merci » ! Je ne sais plus du tout si je l’avais mis dans mon dossier de candidature, mais c’est évidemment une de mes grandes influences. Pour la petite histoire, j’avais vu qu’il jouait à Lyon avant d’être prévu sur la RBMA et j’avais pensé y aller en pensant faire l’aller-retour, et finalement je me suis retrouvé à jouer avec lui à Paris !
Faire ce festival à domicile, qu’est-ce que ça change pour toi ?
Et bien j’en ai entendu parler parce que c’était à Paris justement, avant je ne connaissais même pas l’existence de la RBMA. Je suis allé à une lecture en mars, celle de Brodinski, organisé par RBMA. À la base, j’y suis allé car c’était gratuit et que c’était l’occasion de voir face à toi Brodinski. Il y avait sur chaque siège un formulaire, que j’ai lu et qui m’a donné envie de postuler. Et puis en regardant d’un peu plus près, j’ai vu que tous les artistes que j’adorais étaient passés par là, je me suis dit qu’il fallait tenter !
Comment se passe alors cette candidature ? RBMA affirme poser des questions philosophiques pour intégrer le crew, quelles sont-elles ?
En fait c’est un dossier de 17 pages à remplir. Ils essayent vraiment de cerner ta personnalité, pas forcément ce que tu as pu réaliser, car ce n’est pas ça qui compte, pas les chiffres, mais plutôt ce que tu as dans la tête. Ces 17 pages te permettent de faire une synthèse de qui tu es, j’étais donc content de l’avoir fait, même si je n’avais pas été pris. Puis tu y ajoutes un CD démo. Il n’y avait pas vraiment de questions philosophiques, mais par exemple une question avec un cadre blanc dans lequel on devait dessiner notre rapport avec la musique. On nous a aussi demandé la dernière fois où on avait pleuré…
Ça creuse quand même dans l’intime !
Oui c’est sûr mais ça ne m’a pas dérangé.
Qu’est-ce t’apporte la RBMA ? Sur toi, sur ta musique ? Quels moyens ?
En premier lieu, c’est une super vitrine. Personnellement, je ne sors de nulle part. Je suis au stade de fœtus, ça apporte beaucoup de visibilité. Quand tu vois la team studio, Just Blaze, Mad Mike par exemple, ils sont super impliqués dans l’énergie des participants, mais que ce soit les photographes, la team studio, ou autre, tout le monde est à fond dedans, il y a une belle cohésion, tout le monde mange ensemble, je dors à l’hôtel avec les autres participants, je passe 2 semaines en famille !
Tu te considères comme un fœtus, mais arrives-tu quand même à te considérer comme un vrai producteur, à te sentir à l’égal des autres ? De réussir à parler avec Nicolas Godin ou Mad Mike de producteur à producteur ? Et non pas élève/prof ?
Je me considèrerai toujours comme un élève, c’est une superbe occasion pour apprendre ce que j’aurais pu mettre 20 ans à savoir. Ces mecs ont changé l’histoire de la musique et ils viennent te voir pour te conseiller.
Tu arrives à créer des connexions avec les autres participants ?
Le fait que tout se fasse ensemble, que ce soit un petit environnement, que tu évolues avec les autres, tout est fait pour que tu collabores, ou au moins échanger avec un concentré d’artistes qui ont tous un passé différent, un process différent… Mais sinon j’ai toujours travaillé en groupe, avec des amis du lycée, qui ont un groupe qui s’appelle Red Off. On a commencé ensemble, donc dès que je fais un son, on est à 3 dessus. J’aime avoir des gens qui ont la même affinité pour la musique, mais avec un autre point de vue. Et ici c’est top car on est tous à égalité, avec les mêmes problèmes. On peut même se faire des blagues que seuls des producteurs peuvent comprendre !
Il y a donc un vrai esprit de communauté ?
Oui et je pense que d’ici deux ans, tous iront loin, on est tous au même stade, même si certains ont déjà une émulation autour d’eux, ou d’autres comme moi qui sortent un peu de nulle part, on est juste là pour être meilleur, peu importe le reste !
Ta musique a-t-elle déjà évolué ?
Oui carrément, cela faisait longtemps que je n’arrivais pas à produire, j’étais comme bloqué et maintenant je n’ai qu’une envie c’est d’aller en studio et de créer, cela permet vraiment de s’ouvrir.
Il y a eu un moment d’intégration entre vous ? Vous avez écouté vos prods ?
C’était un peu formel, mais oui, on est tous passé un par un ici, dans la lecture room, pour faire écouter nos sons. Mais à l’hôtel, rien n’était prévu et le premier soir, je n’avais pas envie de rester seul. Je voulais vraiment tous les rencontrer donc, avec d’autres participants, on a organisé une petite soirée dans une des chambres, on a acheté un peu d’alcool et fait la fête.
Est-ce que tu as dû signer un contrat ? Avec des conditions à respecter ?
Non pas du tout, on fait vraiment ce qu’on veut. Ils nous ont bien expliqué que les lectures étaient très importantes, que c’est chronophage pour les artistes, mais pas d’obligations réelles. Il y a une lecture que j’ai ratée à moitié car j’étais en studio en train de masteriser, je ne pouvais pas le faire à un autre moment. Ils sont vraiment cools, les studios sont accessibles 24h/24, la bouffe, la boisson sont à dispo toute la nuit. Il n’y a pas de contrats, juste des conseils pour que l’on tire le meilleur de ces deux semaines hyper-intenses.
Et qu’en est-il de l’après ? T’engages-tu auprès de la RBMA pour une durée déterminée ?
En fait, c’est pour la vie. Tout est facilité, en termes de presse, ou autre, il y a plein de choses qu’ils font pour toi. Maintenant, je peux booker les studios Red Bull quand je veux. Ils offrent des opportunités à des personnes qui n’en ont pas forcément les moyens, pour qu’en tant que producteur on puisse se concentrer un maximum sur notre musique et ne pas gérer la comm’ par exemple. Rien que cette interview, je ne l’aurais jamais eue si je n’étais pas venu à la RBMA ! Ou alors dans 5 ans !
Quel est ton projet artistique alors ? Tes envies, tes ambitions ?
J’ai commencé il y a deux, trois ans, quand j’ai commencé à toucher le logiciel Ableton avec un pote. À la base, je suis juste un fan de musique. À cette époque, j’étais à fond dans l’électro, genre Justice, et la première chose que l’on fait quand on produit quelque chose, au début, et ça vaut dans n’importe quel art, c’est de reproduire nos influences. Et il m’a fallu un an, un an et demi pour trouver mon son. Nicolas Godin nous parlait de la fois où il a vraiment senti qu’il créait son propre univers, et bien moi je me sens un peu chanceux car je l’ai vécu assez rapidement, et même si le son était dégueulasse, j’ai pu sortir mon projet et savoir où je voulais aller. Je suis donc reparti de zéro et j’ai commencé à réfléchir à toute une symbolique autour de ma musique et je suis enfin arrivé à me dire : « Ça y est ! C’est du Keight !
Tu avais déjà fait quelques dates ?
Et bien non, c’était ma première performance ! En plus au Trabendo, où j’étais allé voir Childish Gambino donc c’était vraiment impressionnant ! Une semaine avant, j’avais mixé au Mellotron, grâce à RBMA. J’étais super stressé car c’était la première fois devant des gens, et même si c’était dans un bar, ce n’était pas la même énergie, donc gros stress ! Mais bon, je suis bien content de l’avoir fait avant le Trabendo, car je savais que je ne voulais pas être trop sur mon contrôleur, ça me fait chier et moi-même ça m’emmerde de voir des artistes faire ça. Et je crois que tout s’est bien passé, les retours étaient très bons.
Et alors, tu es obligé de boire du Red Bull ?!
J’en profite c’est sûr, mais pas seulement ! Tout est gratuit et à volonté ! Je ne vais pas non plus en boire tous les jours. À un moment, je suis content de boire de l’eau ! Quand j’étais petit, je n’en achetais pas car c’était trop cher et là j’ai des frigos remplis partout !
Ta vision de la marque a changé ?
En fait, pour moi, la RBMA n’a rien à voir avec Red Bull. C’est juste une branche comme la fondation Louis Vuitton ou EDF. C’est eux qui financent, mais ce qui importe c’est ce qu’il y a à l’intérieur, c’est très bien qu’ils fassent ce genre de chose. Avant, je n’avais aucune image de Red Bull, c’était juste une boisson énergisante ! Le plus important c’est la RBMA, qui nous apporte beaucoup. C’est très valorisant pour chaque personne faisant de la musique. Mais on n’est pas sponso par Red Bull non plus, on a juste la chance de travailler avec un matériel de fou et d’avoir un gros concentré d’opportunités.
Tu connaissais d’autres participants ?
Il y a juste Sevdaliza dont j’étais déjà un grand fan, et River Tiber puisqu’il traine avec le label Soulection.
Tu nous en conseillerais quelques-uns ?
Tout le monde vaut le détour ! Au début, j’allais plutôt vers ceux avec qui j’avais des affinités musicales, comme Desampa, Jade Statues, Miso, mais tous ont un vrai personnage, comme John Pope. Quand on s’est tous montré notre musique, j’ai compris pourquoi nous étions tous là, tout le monde a quelque chose de très puissant. La playlist n’est pas suffisante, entendre leur prod sur du bon matos, ça change vraiment de tes écouteurs !
Tu es graphiste à la base ?
J’ai commencé des études dans le multimédia mais j’ai arrêté car je m’ennuyais. J’ai toujours été intéressé par les images, je suis passé par plein de phases, avec l’envie d’être architecte, peintre… mais ce qui revenait c’était ce que pouvaient évoquer les images, que ce soit dans le graphisme ou la musique.
Je fais mon travail de graphiste en free-lance avec lequel j’ai quelques projets, et tous les visuels que je peux créer m’apportent quelque chose dans la musique, il y a plein de lieux communs. Tout est une question de proportion en fait ! Pourquoi je m’arrêterais à la musique alors ? Nicolas Godin en parlait aussi puisqu’il a fait des études d’architecture.
Cette rencontre a donc résonné pour toi ?
Oui, même si je ne suis pas fan d’Air à la base, je ne connais que Moon Safari, et très peu leur discographie. Mais oui ça m’a beaucoup parlé, c’est bien de savoir que des artistes qui ne font pas du tout la même musique que toi connaissent les mêmes galères. J’ai la chance d’être dans une ère très favorable et je me dis qu’il faut vraiment que j’exploite tout au maximum, que je n’ai rien à perdre.
Deux moments forts de cette session RBMA ?
La lecture de Kindness car il ne s’est pas ramené comme star mais vraiment comme humain, qui parle de sa vie, avec ses problèmes, ses aspirations, du fait de faire quelque chose de bon, même si tu es dans la merde… Hudson Mohawke, car c’est un de mes producteurs préférés, grand respect ! Mais toutes les lectures sont importantes. Et comme événement, celui au Garage Mu. C’était hardcore, c’est pas du tout ma came la techno modulaire, moi je suis en mode clavier midi avec trois touches et c’est fini, mais eux c’est des vrais bricoleurs, super énergie en mode street, dans un garage ! Puis le live à la Gaîté avec Noahs Heark, les visuels étaient sublimes et le son était parfait ! Et le mieux c’est que ce n’est pas fini !
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Interview : Guillaume Sorge
Dans une Gaîté Lyrique hyperactive, redécorée aux couleurs de la Red Bull Music Academy, Guillaume Sorge nous apparait aussi occupé qu’accessible. L’homme a de multiples casquettes dans la structure, entre studios à Paris, programmation et RBMA Radio. Après avoir cherché un endroit libre et calme, c’est finalement de façon ironique que nous trouvons une place… dans un studio.
Tu peux nous expliquer ce que tu fais au sein de la RBMA ?
J’ai un rôle un peu de goal volant au foot en fait. Je fais plein de choses différentes. Je suis freelance, je fais des choses à côté, mais je travaille pour Red Bull France. J’ai un rôle de directeur artistique en ce qui concerne la galerie et le studio. Je monte des projets artistiques liés à l’image et beaucoup à la musique. J’ai donc beaucoup travaillé à l’Academy, sur la programmation des évènements avec l’équipe RBMA. On était 4 à bosser sur les 25 évènements. J’ai programmé également quelques lectures et j’ai aussi travaillé sur l’expo Paris Musique Club à la Gaîté Lyrique. J’y ai fait la partie musique, en proposant des musiciens qui ont collaboré ou fait des créations pour les installations de Scale et sur la programmation des collectifs.
Comment tu t’es intégré à Red Bull alors ? Par affinités ?
Comme souvent dans la vie, par hasard. Je travaillais dans la musique, j’étais journaliste avant. J’ai monté un label, Dirty et donc je programmais des soirées. On sortait les disques de Piloosky, Tristesse Contemporaine. C’est plus un hobby qu’un label mais on continue de sortir pas mal de disques. On vient d’ailleurs d’en sortir un. Et je fais aussi de l’illustration sonore pour des musiques de défilé, notamment Lanvin.
Quelle forme prend le festival RBMA ? Comment tu le définirais ?
Alors, pour moi, ce n’est pas un festival. C’est plutôt une forme hybride parce que le cœur de l’Academy, c’est là où nous sommes, c’est un endroit où les jeunes viennent bosser et collaborer ensemble. Du coup, la partie émergée de l’iceberg, c’est ce festival qui fait 25 dates qui sont pour ces jeunes un moyen de jouer et de les mettre dans un contexte différent, leur montrer qu’on peut s’investir dans la musique, en programmant aussi bien du black métal avec Sunn O))) que de la musique africaine ou de la deep house. C’est donc un festival mais c’est plus compliqué que ça.
Ça peut donc être vu comme un incubateur ?
Ouais ça peut l’être... Ce n’est pas du mécénat parce que ce n’est pas totalement désintéressé. C’est une forme de communication pour la marque. Mais c’est une forme de communication qui est intelligente et qui a du sens pour moi. Je trouve ça super qu’une marque fasse un projet où il n’y a rien à gagner. L’Academy pour moi, ça ne rend pas hommage à la noblesse du truc à part venir ici rencontrer des gens, bosser avec des mecs comme Modeselektor qui sont à votre service, qui vous branchent les câbles et qui vous aident. Il n’y a pas de jugement à la fin pour savoir si le morceau est bien ou pas, l’idée est juste d’arriver à faire des choses ensemble et puis de rencontrer d’autres musiciens. Donc oui c’est une sorte d’incubateur et on peut le voir comme ça parce qu'il y a plein de gens autour, comme Hudson Mohawke qui maintenant fait des prods pour Selah Sue et Kanye West. C’est un gamin qui a fait l’Academy.
Et par rapport à la programmation, toutes les soirées sont vraiment organisées par et pour la RBMA, ou il y a certaines dates programmées par opportunisme?
On est dans une logique de programmation donc effectivement ça rejoint celle de programmation d’évènements. On sait que Floating Points est un artiste qui a déjà fait plein de trucs avec RBMA, qu’il sort un disque, qu’il cherche des dates... Après, avec cette logique-là, on se retrouve à bosser comme un programmateur de festival, mais il y a d’autres enjeux qui rentrent en ligne de compte.
Quels sont donc les enjeux artistiques ? Des thèmes récurrents selon les éditions ?
Le thème récurrent est la scène française, une certaine vision de celle-ci. C’est pour ça que la Closing Party aura 4 niveaux à la Gaîté Lyrique avec seulement des artistes français. L’idée est d’avoir aussi une sorte d’instantané de la vitalité de la scène française. Et si l’Academy vient à Paris cette année, ce n’est pas pour rien non plus. C’est parce que la scène est florissante. C’est aussi une histoire de lien entre les générations. La musique est placée dans un certain contexte. Je prends pour exemple la soirée Afrique Polyrythmique où Nahawa Doumbia, qui est de la pure musique africaine, est mélangée à Congopunq, qui est lui français et qui est peut-être le plus africain des groupes blancs français, avec en même temps Nosinja qui vient d’Afrique du Sud. Voilà, l’idée est vraiment de mélanger les contextes et d’offrir un instantané mais subjectif et différent de ce qu’on peut voir dans d’autres festivals. En général, RBMA aime bien mettre la musique en perspective.
Comment organise-t-on un festival avec autant de lieux et de styles de concerts ?
Et bien on s’arrache les cheveux ! (rires) C’est compliqué parce que chaque lieu a son public, ses spécificités, sa jauge. Comme Paris est une ville florissante en termes de musique en ce moment, il y a énormément de concurrence donc beaucoup de choses à faire. L’idée est de faire des shows pour des petites jauges mais aussi des grandes, et de faire vraiment un spectre super large. Moi je suis hyper content qu’il y ait à la fois Afrique Polyrythmique et Sunn O))), une rave de douze heures dans une carrière à Issy-Les-Moulineaux (qui est aussi un clin d’œil au début des raves françaises) et en même temps avoir Kamasy Washington qui fait découvrir le jazz et le free jazz aux gamins qui aiment bien Flying Lotus, autant que Liturgy avec Colin Stretson. Ça c’est super, en tant que programmateur, c’est excitant parce qu’il n’y a pas de limites et aucune marque ne propose un panorama aussi vaste avec une implication aussi sérieuse, au risque de ne pas avoir des choses populaires pour privilégier des choses pointues.
Est-ce que je peux poser la question piège du budget d’un tel évènement ?
Honnêtement, je n’en sais rien et si je le savais, je ne serais pas censé vous le dire. Ca me dépasse. Mais ce n’est pas claquer des tunes pour claquer des tunes. Les gens qui viennent savent pourquoi. Par exemple, quand on a Modeselektor qui est pendant quinze jours ici, je pense qu’ils sont bien payés mais ce n’est pas qu’une histoire d’argent.
Il y a un retour aussi ?
C’est parce qu’ils sont bien, ils adorent. Hier (ndlr : dimanche 1er novembre), on a fait un tout petit event au Pop-Up du Label. Modeselektor ou Underground Resistance ne sont pas obligés d’y aller. Leur travail est d’être ici en studio, et pourtant ils étaient tous hier à 23h une bière à la main en train d’écouter et kiffer. Après, oui il y a de l’argent pour bosser correctement donc c’est cool.
La valeur humaine passe avant tout alors ?
Attendez, je ne vous dis pas qu’on est au pays de Oui-Oui non plus (rires). C’est pas le cas, mais les gens qui sont impliqués dans l’Academy sont des gens pour qui l’argent n'est pas un souci parce qu’ils gagnent bien leur vie ailleurs et s’ils le font ce n’est pas que pour ça, il y a quelque chose d’autre qui les motive.
L’Academy change de lieu chaque année. Qu’est-ce que cela change selon les continents, pays ou scènes ? Vous en inspirez-vous ?
C’est la dix-septième année. On est un peu le fruit de tout ce qui s’est passé avant. Mais il y a des choses qui ne bougent pas. Par exemple, le fait d’avoir deux lectures par jour est la seule chose imposée aux gamins. Et dans le programme des lectures, il y a des gens qu’ils connaissent, des gens qu’ils adorent, des gens qu’ils ne connaissent pas, ou même des gens qu’ils n’aiment pas. Mais par contre, ils sont quand même obligés d’y aller. Souvent et par expérience, j’en ai faits souvent avec l’Academy, les meilleures lectures sont celles où on n’est pas motivé, où on s’attend à rien. Et finalement, tu découvres et ce sont celles qui te surprennent le plus en général. C’est aussi ça la RBMA, c’est sortir de sa zone de confort, de ses goûts, de ses réseaux et en étant jeune musicien, c’est aller bosser avec un mec du Pakistan ou un Philippin qui fait de la drum’n’ bass. C’est le truc cool et ce qui fait que ce n’est pas seulement un festival. Ils mangent tout le temps ensemble, il y a une cohésion.
Il y a une tribu ? Tu dis avoir travaillé sur différentes Academies donc y a-t-il un noyau dur ?
Pas « travaillé » mais « visité ». J’ai fait Madrid, New York et Tokyo, mais comme invité. Ce qui est différent par rapport à mon implication.
La RBMA prend l’énergie de la ville ? Elle investit Paris après avoir investi Tokyo...
Ah oui, c’est pour ça qu’il y a plein de gens qui sont impliqués. Le community manager, c’est Coni de ClekClekBoom, il y a des Français et des Parisiens sur quasiment chaque plateau. Tu ne peux pas faire une Academy sans te nourrir de la ville et essayer de la refléter. En bien ou en mal, mais il s’agit de s’impliquer. La personne qui a fait tout l’agencement des deux étages à la Gaîté Lyrique, c’est un Parisien. Red Bull ne vient pas avec son crew en fait. Moi, je fais partie de ceux qui programment. Et à chaque fois qu’il fallait prendre des décisions sur les activités françaises, j’étais impliqué parce qu’il ne s’agit pas d’un projet international qui arrive en pays conquis en disant « hey les mecs, on va vous montrer ». Ce n’est pas du tout leur façon de faire.
Tu as eu des retours des artistes qui ont fait les précédentes éditions ?
Beaucoup. Le truc qui est bien, c’est que Red Bull a un réseau de studios — je le vois bien puisque je m’occupe de celui de Paris — par exemple, La Mverte, qui a participé à l’Academy l’année dernière a depuis enregistré ses deux EP au studio. Là-bas, il a rencontré Alejandro Paz de Cómeme, ils ont fait un EP ensemble au studio. Puis, par le réseau RBMA qu’on a en France, je l’ai fait booker aux Transmusicales de Rennes. Jean-Louis Brossard, le directeur des Transmusicales, a surkiffé donc il lui a filé une résidence à l’Ubu. Il joue là-bas tous les mois pendant un an. On l’a fait jouer sur la scène RBMA au Sonar Festival, il a joué aux Nuits Sonores avec Alejandro…
Oui ce n’est pas du tout mettre en avant pendant deux semaines et puis lâcher les artistes. Il y a un suivi qui n’est pas contractualisé.
Carrément. Et Lafawndah, qui faisait l’Academy aussi l’année dernière, est revenue travailler au studio et là, elle a signé chez Warp. Elle sortira son album chez Warp. Le fait qu’elle signe là-bas après, on y est pour rien. C’est elle seule parce que sa musique tue et que Warp la voulait.
Il y a une part d’affectif qui se crée aussi alors ?
Oui, après je ne peux pas être pote avec tout le monde, ça reste subjectif. Mais La Mverte, oui c’est devenu un pote parce que c’est un mec super : c’est un très bon DJ, c’est un gamin brillant, il est très cultivé, il est super sympa. J’ai fait une fête pour mes quarante ans, il est venu passer des disques (rires).
Donc tu restes toujours avec l’étiquette RBMA ou finalement, avec tout ton réseau même hors-RBMA, tu arrives à suivre ces artistes-là, à les introduire, ou tu restes estampillé RBMA ?
Non, il y a un truc affectif qui se crée. Avec La Mverte, c’est différent parce que je n’y étais pas quand il était à l’Academy. Mais quand tu vis quinze jours non-stop avec des personnes, il faut voir. C’est vraiment fort. Ils mangent le matin, le midi et le soir ensemble, ils font la fête après. Souvent après la fête, ils reviennent ici bosser en studio parce que les studios sont ouverts 24h/24. Ils sont à l’hôtel en face de la Gaîté Lyrique donc c’est vraiment un genre de tribu. Il y a des liens forts qui se créent je pense. Un lien affectif, c’est pas avec tout le monde non plus, faut matcher personnellement.
Tu as participé aussi à la sélection ?
Pas du tout. C’est quelque chose que Red Bull fait seul avec beaucoup de sérieux. Les candidatures viennent de 102 pays je crois. Il y a des milliers de candidatures et au final ils en gardent soixante. Ils ont leur cuisine interne pour tout écouter, voir qui garder ou non.
De l’autre côté, est-ce que les labels attendent la sélection RBMA à chaque fois ? S’il y en a qui signent chez Warp…
Douchka par exemple, qui a fait l’Academy l’année dernière, est chez Nowadays et le fait d’avoir fait l’Academy est un plus pour les labels parce qu’ils savent que derrière, ils ont un support. Même OK Lou, qui fait l’Academy cette année, a déjà eu son portrait dans les Inrocks, elle est dans le Elle, le supplément de l’Obs’… Il y a quelque chose qui fait qu’il y a une attention particulière des médias et il y a un support. Ça veut dire qu’il y a de meilleures conditions pour travailler. Quand tu es dans un label c’est compliqué de financer et produire un disque, il n’y a plus de tunes. Quand tu sais que derrière il y a un réseau qui permet d’avoir accès à des studios pour enregistrer et qui peut te permettre de passer sur des gros festivals, pour un label ou un artiste qui veut être signé, c’est un plus. Mais c’est plus aux artistes qu’il faut le demander je pense.
Et avec une grosse démarche « éducative » auprès des artistes. Est-ce que, du côté du public, il y a la même démarche ou est-il seulement considéré comme une foule qui va seulement venir aux concerts ?
La démarche pour le public est vraiment du côté festival. Ce que je trouve super noble de la part de RBMA est de ne pas faire de ces deux étages à la Gaîté Lyrique un zoo mais de protéger le projet. Les lectures sont protégées, il y a très peu de gens qui viennent ou d’invités, les participants ont Laurie Anderson, Brian Eno, Steve Reich pour eux et ça serait facile pour une marque de dire « c’est cool ce qu’on fait, regardez qui on ramène » et ils ne le font pas. Ce serait horrible que des gens viennent, fassent des photos pendant que les autres bossent. Donc la partie éducative est plus du fait qu’il y ait 25 évènements qui couvrent un spectre très large, le fait qu’il y ait le RBMA Daily avec des articles assez pointus éditorialement parlant tous les jours en ligne (sur le French Boogie etc.) qui donnent une sorte de contexte autour de la scène musicale, qui sont alimentés par des lectures publiques avec Jean-Michel Jarre notamment. Ça donne des éléments de contexte et ce n’est pas prendre les gens pour des cons non plus. Il y a des évènements qui vont du noise à la musique africaine avec tout le spectre entre les deux. On vous propose tout un corpus de textes, d’interviews. « Do Let The Dogs » quoi.
Cette année, c’est surtout des évènements qui tournent autour de l’électro, mais est-ce que c’est un phénomène générationnel qui s’inscrit dans la durée vu qu’il y a déjà eu dix-sept éditions ?
Ce n’est pas que ça. Parmi les participants, il y a beaucoup d’instrumentistes aussi, ce n’est pas que des producteurs électro mais c’est vrai qu’il y en a pas mal parce qu’aujourd’hui, quand tu as 20 ans et que tu as un ordinateur, tu fais la musique dessus et donc de fil en aiguille, on y arrive.
C’est aussi un reflet du type de candidatures qu’ils reçoivent. Par contre, sur les évènements ce n’est pas qu’électro. Si on prend par exemple cette semaine, ce soir (lundi) il y a Floating Points, demain (mardi) Colin Stetson qui est un saxophoniste avec Liturgy qui est quand même un groupe métal. Après-demain soirée bass-music avec Dj Funk, Feadz, Manaré. Le surlendemain, concert de Nicolas Godin, on ne peut pas dire que ce soit vraiment électro, on est plutôt dans la veine pop à la française, sound project sur Bach… Et après Modeselektor, donc oui il y a de l’électro mais elle est contrebalancée.
Par exemple, qu’est ce qui a changé chez RBMA et dans le monde de la musique depuis 1998 ?
Je n’étais pas là en 1998 mais j’ai l’impression que le niveau s’est élevé. Je suis allé à la première lecture qui n’en était d’ailleurs pas une. Chaque participant passait sur le canapé et faisait écouter ce qu’il faisait pour se présenter, dire qui il était. Franchement, on peut ne pas aimer le style mais quand tu vois un nerd philippin avec ses petites lunettes, qui a 20 ans, et te laisse bouche bée, il y a un certain niveau de maturité. Et je pense que par rapport à 1998, ce qui a changé c’est le niveau technique et le niveau d’appréhension du business, des réseaux sociaux etc. C’est ça la révolution. Au-delà du fait que l’industrie du disque est plus basse qu’avant, c’est surtout le pouvoir des réseaux sociaux, et ce sont en fait des générations de musiciens ultra-connectés, ultra-conscients du marché, de la façon de faire les choses, des gamins qui ont une culture énorme. Moi qui suis vieux, à l’époque il fallait acheter des disques, il fallait démarrer en tant que journaliste pour recevoir des disques gratuitement. Maintenant si tu as une connexion à internet, tu télécharges illégalement vingt disques de musique Gnaoua, trois mix de Dance Mania, de la musique de marche pakistanaise, et donc on a des jeunes qui connaissent la musique de façon hyper empirique, en hypertexte. Ils fonctionnent en référence, sont beaucoup plus smart que nous.
On voit qu’il y a un gros accompagnement sur le processus artistique ou créatif mais, pour le côté plus technique et logistique, est-ce que les participants rencontrent aussi des personnes de ce milieu-là comme des managers, des producteurs ?
Ça, ça se fait moins autour de RBMA. C’est ici plus un travail de collaboration ou d’inspiration. Ce n’est pas le FAIR.
J’imagine que dans la sélection, on cherche ce genre de profil mais on peut aussi tomber sur des artistes qui sont incapables de nommer leur démarche artistique. Est-ce qu’il y a par exemple un travail là-dessus ?
Je le fais plus au niveau national. Je bosse vachement avec les gens qui font tourner. On le fait souvent après qu’un artiste ait organisé en studio une séance d’écoute. Tu mets une bouteille de champagne au frais et tu invites quelques personnes qui peuvent être potentiellement intéressées. Si ça vaut le coup ! On n’est obligé de rien, ça dépend si on croit au projet ou non.
Il n’y a pas de rencontres avec les tourneurs par exemple ?
Non pas comme ça. Et puis c’est lourd de faire ça je trouve. Tu as l’impression de te retrouver dans un speed-dating organisé au Printemps de Bourges, avec un verre de pinard dans un gobelet et un punk à chien dehors.
Est-ce qu’il y a une étape bilan aussi ? Est-ce qu’une fois que tous ces petits académiciens sont partis, la grosse team RBMA internationale refait un bilan avec la team Paris ?
Je te dirai ça après. Là, on est un peu pris par le temps. La seule chose qui est écrite sur le rétroplanning, c’est « Survivre ».
Qu’est-ce que tu veux que les artistes ou le public retiennent de l’expérience parisienne ?
Dès que tu es une marque et que tu essaies de faire des choses, en France tu es suspect. Il faudrait que les gens comprennent qu’on peut être une marque et faire des choses qui ont du sens. C’est tout. Pour les artistes et les labels, ils comprennent assez vite que c’est cool. Pour les médias, on a l’impression d’être Satan, de vendre des canettes aux gosses en leur faisant faire de la musique…
Ça ne t’est jamais arrivé de paraitre comme le « pestiféré », le vendu qui travaille avec Red Bull ?
Ah non non, c’est plutôt « tu veux ma carte de visite » ? Je ne suis pas le seul représentant musique chez Red Bull en France. Il y a d’autres gens aussi.
Et que penses-tu d’Heineken qui fait à peu près la même chose que Red Bull. On a vu sur le Pitchfork la soirée d’Opening avec Greenroom et la Clôture avec RBMA…
Je pense qu’Heineken fait un chèque à Pitchfork pour avoir un nom sur un évènement cool et Pitchfork fait la programmation. Moi j’ai galéré pour récupérer Laurent Garnier, Hudson Mohawke qui a fait ses premiers pas de musicien à l’Academy. Il est très lié avec tout ce qu’on fait. C’est nous qui avons travaillé sur la programmation avec Pitchfork, mais ce n’est pas Pitchfork qui a fait la programmation du tout. Loin de là.
Et la prochaine étape du RBMA ? Est-ce qu’on sait où cela se passera ?
On peut le dire ? (se retourne vers l’attachée presse). On va dire qu’on ne sait pas ! Une chose est sûre, c’est tous les ans en novembre.
Et la prochaine étape de développement du RBMA ?
En France, on fera des dates en province en début d’année en février à Lyon, Grenoble, Marseille notamment. Il y aura des lectures aussi, mais le problème est qu’on est censé bosser dessus maintenant et que là, comme vous pouvez le voir, c’est un peu compliqué !