On aura toujours un sentiment mitigé face à la sortie d'un titre posthume. Partagé entre le bonheur de voir un nouveau morceau d'un artiste qu'on apprécie et le rappel incessant que l'artiste en question est décédé. Un ressenti qui prend encore une autre dimension quand on oppose la vision clairement financière et l'appât du gain derrière ce type de sortie et la véritable envie de rendre hommage à l'artiste.
À titre d'exemple, comment expliquer la sortie de l'album You're The Man de Marvin Gaye 47 ans après son enregistrement ? Qu'est-ce qui justifie, si ce n'est les liasses brassées par les ayants droit, le fait de garder secrets des morceaux que tout le monde (y compris) l'artiste a envie de partager ? Un procédé dont Charles Bradley a également fait l'objet avec Black Velvet, un album sorti un an après la mort du "Screaming Eagle of Soul". Les délais sont évidemment différents et on vous accorde que la sortie aurait dû/pu se faire de son vivant. Ce putain de cancer en a décidé autrement.
Derrière ce constat, il y a quand même le plaisir de pouvoir continuer à écouter de nouveaux titres de l'Américain. Un plaisir clairement pas coupable et parfaitement assumé. Peu de temps avant de mourir, Bradley s'était enfermé en studio à New-York accompagné de ses musiciens et du producteur James Levy. D'après Levy, "Charles savait ce qu'il voulait dire et l'a dit rapidement". Cela donne "Lucifer", un morceau dont la joie contraste avec la fatalité. Le soul man prend même le temps de penser à Obama, plaçant un "You've done what you had to do / you changed the world". Malgré sa vie tragique, Bradley a toujours été un éternel optimiste et quelqu'un qui a cru en une Amérique meilleure - on vous en parlait plus en détail dans la chronique de l'album Changes.
Autrement plus triste, on partage également avec vous "Lonely As You Are", un autre titre sorti de ces sessions new-yorkaises et paru fin avril.