Kin, Tout Est Vie
Commençons par nous rappeler que les institutions belges ont tout de même tardé à reconnaître Damso comme un de leurs hérauts. Le soutien, la production et la programmation d’un documentaire sur le rappeur par le service public belge, en 2021, n’est donc pas seulement une bonne chose, mais une correction juste et salutaire – en espérant qu’il ne s’agisse pas là d’une tentative de récupération opportuniste, mais passons.
Avec le court-métrage Kin, Tout Est Vie, que l’on doit à Robin Conrad (aka Loxley de L’Or du Commun), la RTBF offre en effet un nouveau regard sur l’artiste, loin de son image médiatique traditionnelle, qui pourrait ici réconcilier les divers publics du royaume. Durant 27 minutes, on découvre alors un homme apaisé, en quête de ses racines, au fil d’un discours toujours pesé et bienveillant, comme si Damso venait de passer une étape initiatique avec la sortie de QALF, son dernier projet. Celle-ci donne d’ailleurs au documentaire son prétexte : dévoiler les coulisses du voyage au travers duquel William Kalubi Mwamba, de son vrai nom, cherche à se reconnecter avec le Congo, ses habitants et son histoire, pour les célébrer à un instant T, éminemment moderne et actuel, qui correspond à la sortie de son album.
Si le reportage est une réussite totale au niveau des images, des atmosphères et des émotions qui se dégagent de ces rencontres, il faut reconnaître qu’il passe un peu à côté de son sujet, notamment par manque de temps : d’une part, l’approche de l’artiste reste en surface selon un traitement positif univoque, sans même réellement aborder son art – excepté lors d’une session d’enregistrement qui apparaît en plein cœur du film — et, d’autre part, la plongée dans Kinshasa ouvre quant à elle une multitude de pistes que le documentaire n’ose pas creuser, du moins dans ce format-ci. Le spectateur ressort alors du visionnage assurément ému, mais frustré. Certes, il sera mis en alerte, et c’est peut-être déjà beaucoup.
Damso comme Kinshasa méritent des documentaires dignes de leurs statures. Kin, Tout Est Vie n’en fait malheureusement pas partie, mais il en pose certains jalons avec une force poétique saisissante, grâce à l’énergie de ses plans. Dans certains propos, il vient aussi fournir au service public belge une invitation que ce dernier ne peut décemment plus ignorer « La Belgique a merdé, mais est-ce que dans son temps, c’était elle qui merdait, ou c’était le monde ? […] c’est trop loin… ce qui est intéressant, c’est le présent […] l’avenir du monde, c’est l’éducation et le respect, c’est aussi la culture » On espère donc que les médias continueront leur processus de correction, en allant une nouvelle fois vers l’avant, comme ce court-métrage vient d’en apporter la preuve. (Amaury)