En Chine avec Green Day ?!!
Aaron Cometbus
En 1994, pas sûr qu’on aurait anticipé le méga succès de Dookie (dix millions de copies) – qui court toujours aujourd'hui – quand on a découvert Green Day avec la vidéo de « Longview » dans le salon familial. Et pourtant, avec le recul, le trio américain crevait l’écran. « Basket Case » est ensuite venu enfoncer le clou, réussissant à allier une énergie punk-rock dans la pure tradition californienne et un vrai sens du songwriting hérité autant des Ramones que de The Who. Du coup, pas de Green Day sur les compilations Punk-O-Rama du label Epitaph bourrées à craquer d’hymnes punk à roulettes, mais bien une signature avec un gros label soldée par une exposition mondiale pour le plaisir des 7 à 77 ans. Ce que l’on sait moins – ou que l’on préfère ignorer – c’est qu’il y a eu une vie avant Dookie, courte, mais intense, dès 1987.
Le coup est classique, il s’agit avant tout d’une histoire de potes. Et qui dit "pote" dit aussi celui qui file les coups de main et partage les plans foireux avec un indéfectible dévouement. Dans ce cas-ci, notre auteur Aaron Cometbus coche toutes les cases de l’ami fidèle, qui n’a cependant pas suivi cette même route du succès – massif. Militant actif de la scène DIY, Cometbus est alors un musicien qui connaît ses limites –remplaçant même une paire de fois le batteur de l'époque – pour très vite préférer se consacrer à sa vraie passion : l’écriture, les fanzines et la vie de quasi hobo qui va avec (voir son excellent Double Duce chez Demain Les Flammes).
Plus d’un à sa place aurait profité de ce passé privilégié pour narrer des années de galères et de rigolades adolescentes en n’omettant aucune anecdote croustillante. Porté par un rythme soutenu et son style hyper fluide, Cometbus prend toutefois le parti de nous faire revivre en filigranes ces années lors d’une tournée plus récente des stades asiatiques, il y a dix ans, suite à une invitation inattendue de la part d'un Billie Joe Amstrong alors revenu au sommet.
Que l’on aime ou non Green Day n’est pas le propos, tant ce carnet de voyage à bord d’une des plus grosses machines rock du moment est avant tout une véritable réflexion sur l’amitié, la liberté, l’ambition et les jugements de valeur un peu trop souvent balancés à l’emporte-pièce. Pour boucler la boucle, l’objet est fidèle à l’esthétique fanzine chère à l’auteur, et au prix qui va avec. Ce qui ne va pas peut-être pas aider à toucher la majorité des fans actuels du groupe, mais c'est bien connu : l'Histoire a toujours tendance à se répéter.
(Eric)
COMETBUS (Aaron), En Chine avec Green Day ?!!.
Trad. Chat Chuffit, Lyon, Tahin Party, 2021, 184 pages.