Goûte Mes Mix #63: Le Motel

Y'aura pas grand monde pour dire le contraire : en 2016, le rap belge a enfin été capable de s'assumer. Tout seul comme un grand. Et putain, il était temps. Aujourd'hui, les porte-étendards se nomment Nixon, Caballero, Hamza, ou Damso. Et Roméo Elvis bien sûr, coupable de l'excellent Morale sorti plus tôt cette année. Un vrai beau disque, chill comme il faut, et qui n'aurait jamais pu fonctionner sans la contribution tout en tendresse du producteur Le Motel.   

La tournée consécutive à la sortie de ce fort beau disque touchant à sa fin, on s'est dit qu'il serait bon d'en toucher un mot à Fabien Leclercq aka Le Motel, qui se charge avec plaisir du debriefing : "Morale est une superbe étape dans nos « carrières» respectives. Nos chemins se sont croisés au bon moment et c’est cette rencontre d’univers qui a donné vie à ce bébé. On a été très agréablement surpris pas l’engouement autour du projet qui a débouché sur une série de très belles dates. Et c’était une expérience assez intense pour toute la straussteam." De fait, sur un album alliant intelligemment visées modernistes et respect pour le premier âge d'or du rap, Romeo Elvis et Le Motel sont passés en mode "full BFF", et l'autre bonne nouvelle, c'est que l'aventure est loin d'être finie : "Après la sortie de Morale, on a continué à travailler ensemble sans trop se poser de questions. On commence à avoir pas mal de morceaux qui sont dans la continuité de Morale mais avec une couleur différente. Morale II se construit un peu tous les jours." 

Tout ça c'est bien beau, mais en attendant la suite (avec impatience, on précise), parlons un peu de the man behind the man. Une personnalité qui mérite vraiment qu'on s'y intéresse, notamment quand on connaît le peu de visibilité dont bénéficient les producteurs de ce côté-ci de l'Atlantique, alors qu'ils sont souvent l'égal du emcee chez nos cousins d'Amérique.  Ainsi, quand on demande à Fabien Leclerq de nous citer ses 5 disques de chevet, il nous sort Music Has The Right To Children de Boards of Canada, Crooks & Lovers de Mount Kimbie, Double Cup de DJ Rashad, Saint-Idesbald de Veence Hanao et Psychedelic Sanza de Francis Bebey. Première constatation : c'est une belle liste. Seconde constatation : d'aucuns auraient imaginé y trouver plus de hip-hop. 

Mais voilà, ceux qui suivent un peu la trajectoire du Motel ou écoutent plus attentivement son travail de producteur auront vite compris que ses beats sont le fruit d'une maturation lente, au cours de laquelle de nombreux ingrédients entrent en ligne de compte - musiques du monde, footwork ou UK bass pour n'en citer que quelques-uns. Cette versatilité, cette ouverture sur le monde qui l'entoure, elles transpirent par tous les pores d'une sélection qui voit Le Motel se la jouer Gilles Peterson du plat pays : "Ca peut sonner fleur bleue mais j’essaye toujours de concevoir un mix comme un voyage qui t’emmène dans des lieux que tu n’aurais jamais pensé visiter ni apprécier. J’ai commencé en douceur avec quelques perles trouvées par hasard sur Soundcloud, puis quelques tracks de 2 excellents producteurs belges (shungu et ltgl), de la cumbia dont je trouve les rythmiques très intéressantes. Pour le reste je vous laisse le découvrir par vous-même." Dont acte.

Le Motel vient de sortir un EP avec la chanteuse Aliosha. Il s’appelle Delude, est très câlin et s'écoute intégralement sur Soundcloud.

https://soundcloud.com/le-motel