Veals & Geeks
Bruxelles
par Bester Langs (Gonzaï Mag)
Un bon disquaire pour moi, ça a toujours été l’adéquation entre les disques et celui qui les vend. Dit comme cela ça peut sembler con, mais c’est précisément la raison pour laquelle je ne mets jamais les pieds chez Caroline Music, dans le centre de Bruxelles, un endroit où les disquaires semblent vieillir plus vite que les albums qu’ils écoutent. À se demander si ce ne sont pas les disques eux-mêmes qui devraient vendre ces vendeurs vintage et peu aimables.
Bref, tout cela nous amène à Veals & Geeks. Je ne sais même plus comment j’y suis rentré la première fois. Ça devait être pour savoir s’ils souhaitaient vendre notre magazine, vers 2015, avant que le piétonnier ne commence à faire du sur-place. Je crois que mon premier souvenir, c’est cette grosse moustache posée sur un crâne dégarni et cette bouche expliquant en anglais à un touriste à quel point la réédition de cette obscure compilation de psyché japonais était indispensable. Ça a commencé comme ça, je venais de faire la rencontre de Stan, le patron ; un homme sans âge sorti d’un supplément DVD de High Fidelity et épaulé par un garçon tout maigre et tout blanc qui, bien que plus jeune, était fin connaisseur des dernières sorties – ce qui n’est pas toujours le cas de son associé, qui ne pratique internet que pour aller vérifier les cotes sur Discogs. Ces deux-là allaient rapidement devenir l’unique raison pour laquelle je me rends dans le centre de Bruxelles.
Veals & Geeks ce sont des disques que j’ai rarement trouvés ailleurs et une véritable amitié avec les tauliers, bien loin des gueules de cul qui peuplent les disquaires et rebutent bien des novices à dépasser le pas de porte. Si vous êtes client des vieilleries étranges francophones, c’est l’endroit. Pour les fétichistes de prog italienne, c’est le Graal. Du classic rock de qualité ? Il y en a - mais heureusement pas trop.
À bien y regarder, la boutique est le pendant du blog Mutant Sounds, qui jadis répertoriait toutes les sorties les plus étranges et passionnantes, de Throbbing Gristle à Richard Pinhas. Veals & Geeks est à cette image ; on y vient détendu du gland sans trop savoir avec quoi on repartira, et c’est précisément ce qui fait le charme de ces bons disquaires où l’on se fait prescrire des médicaments dont on ne pensait pas avoir besoin.
Cinq ans plus tard, une partie de ma discothèque peut dire merci à Stan, Maxime et le troisième larron, Quentin ; à eux trois, ils m’ont permis de comprendre que même si la musique était importante dans ma vie et que je croyais « en connaître un rayon », de larges pans restaient encore méconnus. Et c’est toujours le cas.
Le dernier numéro de Gonzaï est disponible en kiosque. Rendez-vous sur leur page pour obtenir la liste des points de vente.
Quant à Veals & Geeks, le magasin tient bon dans le centre de Bruxelles, où ses bacs vous attendent au 8 de la Rue des Carmes.