Concert

Vodafone Paredes de Coura 2017

Paredes de Coura, le 17 août 2017
par Thomas P., le 17 novembre 2017

Au Portugal, la saison estivale se conjugue avec les énormes Primavera Sound à Porto, NOS Alive et SuperBock SuperRock à Lisbonne, et MEO Sudoeste en Alentejo, qui pourraient chacun regarder du hublot certaines programmations de festivals français. Et puis il y a le Vodafone Paredes de Coura

Après un périple interminable entamé à Lisbonne, j'arrive dans cette campagne montagneuse et forestière du Minho où se trouve la paisible bourgade de Paredes de Coura. Paisible ? Pas tout le temps. Cela fait maintenant 25 ans que cet irréductible festival invite les meilleurs groupes du moment dans un choix artistique cohérent avec son environnement. Un filet de jazz, beaucoup de pop à tendance folk, un soupçon de fureur électrique, mais surtout beaucoup de classe, comme pouvait déjà le démontrer la programmation de 2016 avec entre autres LCD Soundsystem, Kevin Morby, Unknown Mortal Orchestra ou encore King Gizzard & The Lizard Wizard.

Arrivé dans la nuit noire et obscure, difficile de trouver son chemin. Par contre une chose est sûre, ça grouille d'espagnols chauds comme des churros. Enfin posé, At The Drive-In arrive pour nous souhaiter la bienvenue et faire directement sauter la cocotte. La scène principale Palco Vodafone, façon théâtre antique, surgit comme un cratère de volcan où le public est sa lave. Malgré une voix pas toujours très juste et des kilos en trop, le groupe respire l'unité et sa musique ressortie des placards ne perd pas son énergie. La nécessité de trouver un espace libre dans l'anarchie harmonieuse du camping nous fera suivre Nick Murphy d'une oreille très tendue, tandis que Jambinai nous aura fait bouger les hanches dans la tente.

De jour, le festival se révèle : la Coura devient plage et espace aquatique. La ville est aussi partie prenante du festival : aux décorations et pancartes lumineuses aux noms des artistes s'ajoutent des boutiques du festival planquées partout. Mais c'est aussi le seul endroit ouvert pour boire et manger avant l'ouverture des hostilités. Pas bête comme idée pour le commerce local. 

Histoire de manger local donc, on ira voir Bruno Pernadas proposer sa pop jazzy aux inspirations métissées ou Cave Story dans un genre plus nerveux. A l'international, Andy Shauf confirmera cette tendance jazzy avec son physique kurt-vilien pour des compositions proches d'Elliot Smith. Évidemment, le summum de cette couleur a atteint son summum avec BadBadNotGood. Parfaits et parfaitement en symbiose. On ne peut qu'être impressionné de voir un groupe fédérer une jeune génération, là où on pensait cet accueil réservé à une élite ou aux cadors type Marcus Miller.

A y regarder de plus pres, Paredes de Coura recherche des artistes qui seront exigeants avec leur son et avec les rythmes, que ce soit en jazz, electro ou rock. Dans leurs propres styles, les rares Japandroids et Beach House ont clôturé la grande scène dans des sets furieux pour l'un, étincelant pour l'autre, notamment sur un "Elegy to the Void" puissant qui mettra tout le monde d'accord. D'ailleurs, rencontrer la dream pop de ces derniers au milieu de la forêt et des étoiles paraissait finalement si naturel.

Autre jour, autres activités. Vu du camping, le site fait office de colonie de vacances. En attendant que les concerts commencent, Noiserv se réserve une petite interlude pas prévue au milieu de la rivière où grouille le peuple venu prendre le soleil ou la pose, patauger et se rafraîchir. En ce samedi, les débuts sont très inégaux, à l'image de Foxygen, parfois grandioses parfois communs et pales copies de leurs influences. Il faut dire qu'auparavant, White Haus a ramené la foule sur la petite scène Vodafone FM et préparé le final en compagnie de Foals. Final qui ne sera pas le plus attendu. Non, Benjamin Clementine est l'élu de l'édition. Une communion rare où les chants et les lumières des portables ont ébloui de façon instinctive le chanteur, visiblement ému, d'autant plus après l'avoir croisé et signifiant son rapport particulier qu'il a senti avec le public portugais. Sans doute aucun, ce fut réciproque. Après cette cérémonie, Lightning Bolt et Ty Segall ont botté les fesses de ces mêmes cœurs en marshmallow et remobilisé les troupes avec de l'électrique, de la batterie bien grasse et de la classe à revendre. Finalement, les anglais de Foals apparaîtront bien palots en comparaison bien que volontaires.

Pour ne pas rester sur cette fin victime de ses trop bons choix antérieurs, on jettera un dernier coup d'œil aux portugo-angolais de Throes+The Shine, qui nous permettront de conclure cette édition avec la manière, en se disant qu'au Portugal aussi, il y a de la vie, du rythme, et qu'en dépit de son patronyme commercial, l'âme musicale se retrouve là où on ne l'attendait peut être pas.