Miguel
Le Carré, Willebroek, le 27 janvier 2013
Pour un weekend tout en contrastes, ce fut plutôt réussi. Alors que la veille, l’auteur de ces lignes finissait légèrement cramé au Fuse au son du live (un peu inégal) d’Isolée et du DJ set (autrement plus efficace) d’Efdemin, c’est au Carré de Willebroek qu’il se rendait ce dimanche soir histoire de faire passer sa gueule de bois en compagnie de Miguel et d’un public pas vraiment semblable à celui croisé la veille rue Blaes ou lors de n’importe quel concert au Bota ou à l’AB. Disons qu’on avait la légère impression que les fans de Miguel avaient tous sortis leur tenue de soirée pour assister à sa prestation.
Evidemment, on pourrait consacrer un seul paragraphe à l’endroit, tant celui-ci symbolise l’antithèse de valeurs musicales et esthétiques défendues, non sans une certaine mauvaise foi, par GMD. Pour les incultes, le Carré est cette boîte bien connue des footeux et autres BVs à l’égo surdimensionné, et dont le soundsystem crache à longueur d’année de la house bien pupute, de l’EDM des familles et des « club mix » de trucs qui cartonnent à la radio. Et puis occasionnellement, il y a même des concerts. Un petit tour sur YouTube et on tombe sur des vidéos de « concerts » de Flo Rida ou de l’indien des Black Eyed Peas - mais oui, celui que même les autres dans le groupe ils savent probablement pas comment il s’appelle.
Alors forcément, à l’heure de se taper Willebroek pour assister à la date belge de la petite tournée européenne de Miguel, on se posait quand même quelques questions légitimes sur le format du concert et la qualité sonore du bazar. Juste le temps de patienter que le nouveau petit prince du R&B américain monte sur scène vers 21h30, et on était rassurés. Tout d’abord c’est à un concert en bonne et due forme que l’on a eu droit, le crooner de L.A. étant flanqué de son habituel backing band. Quant au son, hormis une mise en route un peu laborieuse faisant craindre le pire, on n’aura pas eu à se plaindre.
Toutes les conditions étaient donc réunies pour que Miguel assure le show. Et à ce niveau-là, on n’a pas trop de soucis à se faire : Miguel a la classe, Miguel danse comme un dieu, Miguel se laisse toucher par un premier rang hystérique, Miguel enlève son t-shirt, Miguel laisse son public chanter son tube « Adorn » à sa place et Miguel se lance dans des monologues plein d’empathie. Et rien qu’à ce niveau-là, son concert bruxellois a été une réussite.
Mais le véritable motif de satisfaction de cette date au Carré, c’est probablement la manière qu’a l’Américain de se réapproprier sa discographie. Si certains morceaux ont été réinterprétés aussi efficacement que sur ses deux albums (All I Want Is You et Kaleidoscope Dream), d’autres se voient carrément magnifiés, allongés, transcendés. Et si il fallait en sortir un du lot, ce serait « The Thrill » qui, dans sa version live, va chercher dans les dix minutes et se transforme en une œuvre d’une richesse folle.
Forcément, pour en arriver là, il a fallu un gros travail en amont, et on sent rapidement que la machine est rodée comme jamais. Pas que Miguel et son groupe soient en roue libre, loin de là. Mais il se dégageait de concert un parfum de professionnalisme doublé d’une envie d’en découdre avec un public peut-être un peu moins acquis à sa cause que quand il se produit sur ses terres. Et pour le coup, on regrette quand même que Miguel ne bénéficie pas par chez nous de la lame de fond R&B qui profite plutôt bien à un certain Frank Ocean ...