Concert

Les Savy Fav

La Dynamo, Toulouse, le 6 juillet 2011
par Michael, le 14 juillet 2011

Autant le dire tout de suite, je ne suis pas un fan de Les Savy Fav. Je veux dire par là que je ne connais pas grand chose au groupe si ce n'est son dernier album Roots For Ruin découvert grâce aux conseils avisés d'un collègue de boulot, qui je le reconnais est fort appréciable et rafraîchissant. Pas d'à priori donc bien au contraire, d'autant que la réputation scénique du groupe le précède comme une mouette le chalutier, si je puis me permettre.

Lorsque j'ai vu que la désormais célèbre Chatte à la voisine proposait le groupe dans sa programmation estivale, l'affaire était entendue. Bref, départ donc pour la Dynamo, qui comme l'indique le livret de prog disponible à l'entrée fête son premier anniversaire et est déjà devenue un des lieux incontournables en matière de musique rock (mais pas seulement) dans la ville rauuseuh. Le lieu à en effet tout pour plaire : petit et chaleureux, un étage avec balcon, deux bars, un fumoir, et un côté ancien bâtiment industriel (ancienne fabrique de sous-vêtements féminins paraît-il) qui n'est pas pour déplaire. Surtout la salle est en plein centre-ville dans un quartier vivant ce qui vient renforcer l'idée grâce aussi au Saint des Seins, au Petit London et aux autres que petit à petit Toulouse redevient une ville rock, et dieu sait que ça fait du bien après des années de vaches maigres.

Pour en revenir à notre soirée, la salle se remplit doucement mais sûrement et ce sont Les Soldes qui attaquent la première partie. Le trio toulousain (batterie, farfisa & clavier, guitare) à la dégaine improbable (combinaison féminine de de tennis une pièce + bonnet de catcheur en cuir pour le batteur et moustache sparko-hitlérienne + casquette SM en skaï rose fluo pour le clavier, seul le guitariste restant sobre avec un très classe T-shirt noir à l'effigie des Liars) lance son garage rock avec une énergie certaine. On alterne entre les morceaux rapides et cradingues et d'autres plus lents et plus psychés, à mon sens les plus intéressants où sur des basses lancinantes jouée au clavier et des rythmes de batterie plus appuyés, le guitariste tire des sons entre Jay Mascis et Lee Ranaldo en version monochrome et répétitive. Le groupe chauffe la salle juste ce qu'il faut avec un set qui se termine par un morceau assez long aux circonvolutions qu'on a du mal à suivre mais qui fait son petit effet, surtout la fin qui se perd dans les gorges profondes du delay.

20 petites minutes de changement de matériel puis ce sont les Les Savy Fav qui descendent sur scène par le petit escalier en colimaçon métallique, et c'est le départ pour un voyage intersidéral dans la galaxie comme nous le confirme l'arrivée de Tim Harrington, dont l'accoutrement est assez indescriptible : des chaussettes de ski muticolores aux poignets, un faux crâne chauve sur son crâne chauve, plus deux paires d'yeux dessinés sur le visage et le crâne en question (le faux, pas le vrai). Le bonhomme dont on sait qu'il est capable d'à peu prêt tout commence ce qui ressemble à un prêche intergalactique digne de Sun Ra (la thématique de la soirée sera le voyage dans le système solaire et au-delà) en brandissant un citron vert surmonté d'un morceau de pastèque phallique et en distribuant des fraises tagada comme des hosties aux premiers rangs. Retentissent alors les premiers accords de "Appetites", morceau d'ouverture du dernier album du groupe.

A partir de là, on aura droit à (dans le désordre parce que c'était dur de suivre) : un déchaussage viril de fan suivi d'une « sensuelle » succion du gros orteil, une danse du ventre, moults allez-retours dans la fosse à quatre pattes ou sur une table roulante, une périlleuse escalade suivie d'un tour du balcon de la salle, une partie de lasso avec une lampe torche dans une salle plongée dans le noir, des prises à partie de spectateurs pour des simulations de fellation ou de levrette, des micros tendus à à peu prêt la moitié du public, le rappel se faisant en slip, lunettes de bain et fanions roses plastiques autour du ventre dans une version toute personnelle de natation synchronisée que Tim Harrington dédicacera au Commandant Cousteau pour une version endiablée du classique "Who Rocks The Party".

Pour l'essentiel le set qui aura duré environ 1h15 (mais il peut s'en passer en si peu de temps vous l'aurez compris) aura fait la part belle aux morceaux de Root For Ruin, dont l'excellent "Sleepless In Silver Lake" ou le tubesque "Let's Get Out Of Her"e durant lesquels les guitares de Seth Jabour et Andrew Reuland font merveille dans un jeu original, tout en complémentarité et sans esbroufe. On aura aussi droit à quelques titres du précédent album Let's Stay Friends.

On se demande quand même à quoi le chanteur fou peut bien ressembler à l'état normal, si tant est qu'il existe. On se dit aussi que ça ne doit pas être facile tous les jours de partager la scène avec un tel phénomène. Car le contraste est assez frappant entre le jeu de scène et l'attitude sage et presque effacée du reste du groupe - à part Seth Jabour qui bouge un petit plus que les autres. La bassiste remplaçante de Syd Butler jette d'ailleurs souvent des regards intimidés en coin et doit peut être se demander dans quelle aventure elle s'est embarquée pour cette tournée. On sort de là un peu sonnés et avec l'impression d'avoir mangé trop de fraises tagadas mais forts contents quand même d'avoir assisté à un tel show, et avec surtout l'envie de se plonger de manière plus approfondie dans la discographie du groupe.

Aux dernières nouvelles Tim Harrington cherche encore ses chaussures, égarées (volées?!) pendant le set...