James Holden
Les trinitaires, Metz, le 17 novembre 2017
C'est dans un silence quasi sépulcral que James Holden et son équipe ont pris place dans la chapelle des Trinitaires, en ce vendredi soir glacial et Lorrain. A ce moment là de la soirée, l'auditoire du festival des Musiques Volantes a pris ces festivités aux mots, et papillonne encore au sein du cloître carmélite, s'empêtrant difficilement du magnétisme d'un caveau voisin. L'électro de synthèse de La Mverte y parasite le thermomètre, entre cold wave et italo-disco. Un set très accessible et relativement efficace, dont seuls les plus audacieux parviendront à s'affranchir pour affronter l'exigence du patron de Border Community.
On se pèle le cul dans cette chapelle. Tandis que le dress code doudoune/bonnet à pompon annihile les perspectives de coller serrer, on se demande si les spectres ascètes des anciens pensionnaires n'y sont pas pour quelque chose. Tel un hommage sacré à toutes ces vies d'oraison et de mortification, c'est la Wiener Wurst à l'air qu'une ouaille locale s'est emparé du lieu de culte plus tôt. Le vétéran Rubin Steiner officiait alors à l'autel, assénant son prosélytisme techno sous haute tension à une nef convaincue. Les agents de sécurité fermeront les yeux sur cet acte de gaudriole, réticents à l'idée d'un contact direct avec cette pièce de charcuterie que le froid avait pourtant réduit à des proportions des plus modestes.
La sortie de l'album de James Holden & The Animal Spirits est encore trop récente pour que notre esprit ait eu le temps de s'en approprier les contours et de s'affranchir de son caractère ésotérique. Le contexte de ce live à Metz est en ce point comparable aux circonstances de sa performance au Sonar en 2014 sur la tournée de The Inheritors. La configuration de son live band ce soir est d'ailleurs assez similaire à cette dernière, avec son batteur attitré et une section cuivre composée d'Etienne Jaumet, moitié de Zombie Zombie, et d'une autre saxophoniste qui maniera également la flute à bec alto avec une improbable pertinence. Assez curieusement, la setlist parvient à marier les nouvelles partitions avec des morceaux tirés de l’œuvre culte de 2014. Difficile pourtant à première vue de trouver le liant entre The Inheritors, complainte extra-terrestre par moments tragique et les tonalités plus chaudes et terriennes des Animal Spirits. C'est dans la performance du groupe que se révèlera leur dénominateur commun, dans le dépassement de l'interprétation, dans ce sens de la progression qui frôle par moments la transcendance. Un jazz du turfu à la singularité déconcertante, aussi généreux que la défense du FC Metz.
On vous aura prévenu, cette tournée de James Holden & The Animal Spirits est un évènement dangereux, au goût de reviens-y à l'impossible satiété.
crédit photo: Rémy Chanteloup