Festival International de Benicassim
Benicassim (Espagne), le 17 juillet 2008
Si les festivals belges ou français de qualité ne manquent pas au programme, il faut bien avouer qu'une inconnue plane toujours sur ces rendez-vous estivaux : j'ai nommé la météo (et tous ceux qui ont surnagé dans la boue lors de la troisième édition des Ardentes ne me contrediront pas). Bien décidés à assister à un festival « soleil compris », trois rédacteurs de Liability ont pris la décision, plutôt que de se rendre à la 20e édition du Dour Festival (à l'affiche un poil décevante cette année), de mettre le cap au sud et d'avaler 1600 kilomètres de bitume pour prendre le pouls du Festival International de Benicassim (le FIB pour les intimes).
Située sur la côte espagnole, quelque part entre Barcelone et Valence, la ville de Benicassim et sa voisine de Castellón ne paient pas de mine et ressemblent à toutes ces cités balnéaires espagnoles tombées aux mains des promoteurs immobiliers dans les années 70. Mais chaque année au mois de juillet, Benicassim est envahie de festivaliers provenant des quatre coins d'Europe (50 à 60 % des 35.000 personnes présentes chaque jour sur le site ne sont pas Espagnoles). Enfin, des quatre coins d'Europe… tout est relatif, car c'est principalement des îles Britanniques que provient l'immense majorité des festivaliers étrangers.
En effet, si cela fait maintenant près d'un millénaire que la perfide Albion n'a plus été envahie avec succès (la dernière fois, c'était lors de la bataille de Hastings en 1066), il ne fait aucun doute que les sujets de Sa Gracieuse Majesté savent comment procéder à un débarquement en règle. C'est ainsi par hordes entières qu'ils prennent chaque année possession des lieux à l'approche du festival et que, quelques jours par an, Gibraltar n'est plus la seule enclave britannique en territoire espagnol !
Mais le FIB, c'est bien plus qu'un Glastonbury ou un Reading délocalisé (même si tous les préjugés que l'on pouvait avoir sur les festivaliers britanniques ont été confirmés – tenues des plus improbables, consommation impressionnante de bière, public incroyablement bruyant mais ne ménageant pas sa peine pour les artistes qu'il apprécie, demoiselles très courtement vêtues et n'ayant jamais entendu parler d'un produit pourtant ô combien utile, j'ai nommé la crème solaire, on en passe et des meilleures). Tout y est en effet mis en œuvre pour que les personnes présentes puissent passer quatre jours des plus agréables : l'esplanade devant les scènes est goudronnée, les espaces verts où se prélasser entre deux concerts sont légion, et les horaires sont adaptés afin d'éviter les heures les plus chaudes de la journée (les premières notes résonnent aux alentours de 18 heures et les derniers beats s'évaporent dans la nuit vers 8 heures du mat'). Pour couronner le tout, il est extrêmement aisé de se désaltérer (mention spéciale aux nombreux bars qui permettent d'obtenir on ne peut plus facilement un rafraîchissement houblonné qui, à défaut d'être de qualité - une grande marque néerlandaise sponsorise le festival - a le mérite d'être disponible dans des gobelets d'un litre permettant aux festivaliers assoiffés d'éviter de trop nombreux allers-retours vers les pompes).
De plus, outre l'aménagement du site qui permet aux 35.000 personnes présentes chaque jour de ne pas avoir l'impression d'être parquées dans un champ habituellement réservé aux bovidés, de nombreux événements extra-musicaux (mode, courts-métrages, arts plastiques, danse, théâtre…) viennent émailler la manifestation et le festival peut se targuer d'avoir une conscience écologique (tri des déchets, utilisation de papier recyclé pour la campagne de publicité et compensation des émissions de CO2) et humanitaire (l'ensemble des recettes de parking vont à Amnesty International). Si l'on ajoute à cela le fait que la journée, il est possible de recharger les batteries à la plage (ou au bar de la plage) et, avec un peu de chance, d'y croiser en maillot de bain des artistes invités à se produire le soir même comme cela nous est arrivé avec les membres de Sigur Rós ou de Battles, on se dit que tous les ingrédients sont réunis pour passer un excellent festival.
« Mais la musique dans tout ça ? » allez-vous me dire. Eh bien là non plus le FIB ne déçoit pas. Avec ses 102 concerts étalés sur quatre jours (ou plutôt quatre nuits) et programmés sur trois scènes, il est parfois difficile de faire un choix entre les différents groupes au menu, les horaires se chevauchant très (trop) souvent. Et lorsque se fait ressentir le besoin de souffler un peu ou qu'il n'y a rien qui vous attire vraiment pendant quelque temps, un petit détour par la Pista pop (un chapiteau où les DJ enchaînent les tubes à un rythme endiablé) s'impose. A moins d'aller découvrir la Silent Disco, un espace où l'on retrouve deux DJ qui jouent simultanément et… dans le plus grand silence. En effet, les clubbeurs présents sur la piste sont tous munis d'un casque sur lequel il leur est possible de choisir entre deux canaux grâce auxquels s'expriment les DJ. Pour l'avoir testé, on peut vous dire qu'il s'agit d'un concept amusant et rafraîchissant.
L'affiche étant, on vient de le voir, pléthorique, il a fallu faire des choix parfois cornéliens (parfois beaucoup moins) et c'est ainsi que dans les comptes rendus qui suivent, on ne vous parlera pas des prestations de certains artistes. Vous ne trouverez par exemple aucune trace des concerts de Death Cab for Cutie ou de The Kills (parce que les horaires sont parfois mal foutus), de Morrissey (parce qu'on a été voir le premier quart d'heure et qu'on a pas trop apprécié l'imagerie et les propos réacs, voire carrément à droite de la droite de l'ancien leader des Smiths), de Mika (parce qu'il ne faut quand même pas déconner) ou de Yelle (parce qu'on préfère encore parler à sa main plutôt que de l'écouter chanter !). Mais assez parlé de ce que l'on a pas vu, passons maintenant aux concerts auxquels nous avons assisté…
Photos: Archivo FIB / François Ollivier, Oscar Tejada, Liberto Peiro, Natalie Paco