Emiliana Torrini
Paris, Le Bataclan, le 30 janvier 2009
Quoi de plus normal qu'aller admirer une chanteuse islandaise en des temps particulièrement réfrigérants ? Les rédacteurs de Goûte Mes Disques aiment à respecter une certaine forme de logique dans le choix de leurs concerts. En l'occurrence, Emiliana Torrini, artiste aussi discrète qu'indispensable, aura donc réussi, sans trop de surprise, à jouer à guichets fermés ce vendredi 30 janvier 2009 au Bataclan (Paris) devant un public de connaisseurs. Cette première date d'une tournée française (avant un concert à la Laiterie de Strasbourg le 18 février prochain) était destinée à promouvoir son excellent dernier album, Me And Armini, sorti à la fin de l'année 2008 et qui constitue probablement l'une des meilleures galettes de l'an dernier au rayon pop folk – un disque chaudement recommandé dans ces colonnes.
Précédée de sa mignonne compatriote Lay Low, dont le modèle n'était pas à chercher bien loin vu le mimétisme vocal avec la belle Emiliana, sans toutefois le grain de folie ni le talent mélodique de cette dernière, l'Islandaise est arrivée sur scène dans une superbe petite robe rouge d'inspiration fifties manifestement un peu trop étroite pour elle, ce qui aura occasionné quelques incidents d'ordre élastique tout au long du concert et qui aura permis de démontrer l'humour et l'autodérision de la brunette, absolument craquante et adorable dans un décor assez élaboré, constitué notamment de lampes au design rétro.
Centré autour du dernier album ainsi que de l'excellent Fisherman's Woman sorti en 2005, le concert, plutôt court puisque d'une petite heure trente seulement montre en main, aura ravi tous les spectateurs présents si l'on en jugeait au vu des applaudissements et cris destinés à exprimer le contentement d'un public généralement trentenaire, heureux de trouver le Bataclan en configuration assise. La précision est d'importance, car la musique d'Emiliana Torrini, malgré quelques apartés bondissants comme sur les enthousiasmantes "Me And Armini", "Big Jumps" ou le single "Jungle Drum", est globalement très calme, très mélodieuse, jusqu'à provoquer le frisson sur la magnifique "Birds", déjà fort appréciée sur disque. Malgré une demande du public, "Dead Duck" n'aura pas figuré ce soir au programme. Dommage, mais la discographie de la brunette aura permis d'aligner deux bonnes dizaines de morceaux extrêmement réussis et aussi agréables à écouter qu'au fond de son lit. Bel exploit !
Accompagnée d'un groupe extrêmement professionnel, l'Islandaise possède – ô surprise – une véritable présence scénique, un charisme indiscutable, qui tranchent avec le côté mutin et enfantin de sa superbe voix, qui pouvaient laisser augurer un concert platounet. Ce ne fut pas du tout le cas. Enchaînant les petites blagues entre les morceaux, Emiliana Torrini est clairement un exemple à suivre, à une époque où la plupart des groupes et des artistes qui se produisent en concert se contentent de jouer leurs chansons sans communiquer avec le public – faut-il encore citer Alison Goldfrapp à cet égard ?
Du coup, tout au long du concert, la température extérieure est devenue inversement proportionnelle à la chaleur ressentie aussi bien dans la salle que dans les cœurs : Emiliana Torrini, attachante, amusante, charmante, a montré ce soir qu'elle jouait dans la cour des grands. On en redemande.