Cold War Kids
Paris, Le Bataclan, le 29 novembre 2008
Si le nom de Cold War Kids renvoie évidemment à la guerre froide, c'est-à-dire à cette période de tension idéologique sans recours aux arsenaux militaires, les prestations scéniques de nos quatre amis californiens, les Cold War Kids, donc, relèvent davantage d'un conflit ouvert, mettant aux prises des armées dotées chacune d'armes de destruction massive et de bombes sales, compte tenu de la formidable énergie déployée par le groupe une fois les hostilités déclenchées. En tout cas la plupart du temps. Malheureusement, pas tout le temps.
Certes, constamment en mouvement, Nathan Willett et sa bande rappellent, sur scène, qu'ils sont bien en guerre, contre l'establishment, pour la défense des petites gens, des laissés pour compte, des voleurs et des lâches qui ont donné son nom à leur premier album, l'excellent Robbers & Cowards, dont les classiques un brin foutraques auront logiquement eu toute leur place ce samedi 29 novembre 2008 au Bataclan (Paris) : "We Used to Vacation", "Hang Me Up To Dry", "Saint John", "Robbers" ou encore "Hospital Beds", marqués par ce piano de saloon omniprésent, auront réussi à mettre la foule en transe, cette même foule restée totalement impassible à l'écoute de la première partie, un groupe islandais au nom imprononçable de Hjaltalin et franchement médiocre.
Cependant, si ce premier album chaloupé porte naturellement le groupe à des hauteurs régulièrement atteintes par Franz Ferdinand, par exemple, on ne peut pas vraiment en dire autant du second, Loyalty to Loyalty, sorti voici quelques semaines et que le groupe venait présenter dans le cadre de la dernière date de sa tournée européenne. S'il n'est pas intrinsèquement mauvais, loin de là, ce disque, plus introspectif que le précédent, sombre et en tout état de cause nettement moins accessible, possède corrélativement beaucoup moins de charme et de morceaux susceptibles de lever les foules.
La preuve en est, par exemple, de "Every Man I Fall For", très belle chanson au demeurant, dédiée aux femmes mariées à des hommes violents et négligents, qui s'est révélée particulièrement longue et ennuyeuse en live, de même que les deux inédits présentés ce soir, dont un titre intitulé "Coffee Spoon", obscur et un peu trop tiré en longueur, loin d'être transcendant en tout cas. Dommage. Le groupe en rajoute d'ailleurs exagérément dans la noirceur, en jouant son set quasiment toujours dans la pénombre, voire dans l'obscurité complète, jouant avec des lampes torches sur "Robbers"… Une mise en scène désormais classique et un brin longuette.
On ne doute pas de la capacité des Cold War Kids à se rendre compte de leurs qualités essentielles, qui résident en particulier dans la voix de fausset de Willett, tout simplement incroyable, aussi à l'aise sur scène que sur disque, y compris dans les aigus, et de leur capacité à enflammer leur audience avec leurs titres dominés par ce piano rageur, celui-là même qu'ils ont un peu laissé de côté sur leur second album. On leur souhaite de rectifier le tir pour leur prochain opus, afin que leurs shows soient totalement survoltés, du début à la fin, et non plus seulement marqués par ces éclairs de génie intermittents, rythmés et euphorisants, de Robbers & Cowards, quasiment absents de Loyalty to Loyalty, à l'exception toutefois des fantastiques "Something Is Not Right With Me" et "I've Seen Enough", sans doute deux des meilleurs morceaux du groupe.
Au final, on n'aura rien à reprocher au groupe, qui aura livré un concert tout à fait honorable et qui aura visiblement plu à la grande majorité de la salle. On imagine toutefois qu'ils sont capables de faire beaucoup mieux et on souhaite qu'ils s'y emploient à l'avenir.