You Know I'm Not Going Anywhere
The Districts
L'année 2015 a marqué un tournant dans la vie de The Districts. La sortie de A Flourish and a Spoil sur Fat Possum va offrir aux 4 amis tout droit sortis d'un petit village de Pennsylvanie la vitrine dont tous les jeunes groupes rêvent, et ce alors qu'ils n'ont même pas encore atteint l'âge légal pour boire. Leur rock post-adolescente fait mouche et le groupe enchaîne les dates autour du globe. Popular Manipulations arrive deux ans plus tard et révèle une autre facette du groupe. The Districts y révèlent que le complaisance ou la répétition ne leur conviennent pas et l'énergie rock du groupe se fond alors dans un univers plus sensible. Le public en veut toujours plus et les Américains repartent sur les routes.
Lorsqu'on sait tout ça, on est évidemment en droit de poser la question de savoir si You Know I'm Not Going Anywhere s'inscrit dans la continuité ou si Rob Grote et sa bande ont opté pour une troisième voie. Une partie de la réponse se trouve dans le communiqué qui entoure la sortie de cette nouvelle plaque qui aurait pu ne pas voir le jour. On s'explique. Complètement grillé par les tournées qui ont suivi Popular Manipulations, Rob Grote a eu besoin de se retrouver, se terrant dans sa chambre et composant sans attente ni limite. Il en est ressorti 32 morceaux qui, selon ses propres dires, "ne ressemblaient en rien à The Districts". Et pour le coup, on est bien obligé de lui donner raison car tout ceux qui s'attendaient à retrouver The Districts là où ils les avaient laissés en 2017 vont se prendre une gentille petite claque.
Dès "My Only Ghost", le premier titre, on est désarçonné. Des chœurs en écho et un univers qui évoque Fleet Foxes nous éloignent de la zone de confort que l'on s'était créée autour du groupe. "Hey Jo" nous en écarte encore un peu plus. On en vient alors à se demander si en cherchant un nouveau chemin, The Districts n'auraient pas complètement perdu tout ce qui faisait leur force. Heureusement, le troisième titre, "Cheap Regrets", nous prouve que malgré cette période de réflexion, le groupe est encore capable de bonnes idées (un commentaire également valable pour "Changing" ou "4th of July"). Chemin faisant, les titres s'enchaînent de façon chaotique et en définitive, l'album peine à convaincre. On perçoit de temps à autre ce qui fait l'essence de The Districts - et surtout les éclats de voix de Rob Grote - mais la multiplicité des écarts stylistiques abordés finit par nous perdre. Ajoutons à tout cela que sans jamais être complètement écœurant, on trouve quand même à You Know I'm Not Going Anywhere une certaine forme de complaisance.
Malgré tout ce que qu'on a pu dire plus haut, notre avis n'est pas totalement négatif et notre optimisme nous pousse à ranger You Know I'm Not Going Anywhere du coté des albums qu'on peut difficilement qualifier autrement que d'"ingrat". Ces albums qui, pour The Districts comme pour tant d'autres avant eux, constituent un passage obligé pour un groupe qui se cherche, qui transite vers quelque chose d'autre. Ce qui nous perturbe le plus, c'est qu'en essayant de proposer quelque chose d'authentique, The Districts nous donnent surtout l'impression d'être quelqu'un d'autre. On a envie de croire que You Know I'm Not Going Anywhere est un mal nécessaire et pas un coup d'arrêt dans un carrière qui avait pourtant si bien commencé. C'est dur à dire pour les fans du groupe, mais il leur faudra attendre la suite et les jours meilleurs sans trop penser au présent, si ce n'est pour les bonnes choses qui pourraient naître de ce faux pas. Un disque qui, du coup, prend une résonance toute particulière en ce mois de mars 2020.