Yes, U
The Devastations
Pour une raison que je ne cherche pas trop à m’expliquer, j’ai complètement passé sous silence la sortie en 2006 de Coal, le deuxième album des Australiens de The Devastations. Sur ce très bon album imprégné d’ambiances mélancoliques et sombres, le groupe avait attiré son lot de comparaisons avec The National ou Nick Cave et faisait perdurer dans la plus grande distinction l’héritage laissé par les Tindersticks - dont ils avaient d’ailleurs assuré la première partie à leurs débuts. Aujourd’hui, la formation australienne basée à Berlin nous revient avec Yes, U, son premier album pour le compte du prestigieux label Beggars Banquet.
Bien qu’ils continuent d’avoir une vision assez sombre du monde et des gens qui le peuplent, The Devastations semblent avoir évolué si on compare cette nouvelle livraison à leurs deux précédents efforts. Aujourd’hui, même si la musique a conservé cette profondeur et cette intensité bienvenues, le son du groupe se fait plus ample et étoffé. Et si cette tension sous-jacente est toujours palpable, elle est cependant diluée dans des ambiances plus lumineuses qu’à l’accoutumée. En donnant davantage d’importance aux claviers, les Berlinois d’adoption touchent à des genres qu’ils n’avaient jusque-là jamais exploré (la new wave notamment) pour un résultat qui s’avère particulièrement probant lorsque les sonorités électroniques ne prennent pas le dessus sur l’ossature guitare-basse-batterie. Une telle évolution devrait d'ailleurs permettre à tous ceux qui reprochaient au groupe de pompeuses tendances misérabilistes de donner une nouvelle chance à The Devastations. Quant aux fans de la première heure, il est fort probable qu’ils voient d’un bon œil la légère métamorphose opérée par le groupe, tant elle semble s'inscrire dans un processus évolutif logique qui n'est pas le fruit d'un quelconque opportunisme.
Vous vous en doutez, Yes, U n’est pas un disque qui convient à tous les types d’ambiances. Toutefois, lorsqu’elles sont écoutées dans des conditions optimales, les longues plages introspectives parsemées de guitares aériennes ou abrasives (voire les deux sur le magnifique « Rosa ») et de nappes sombres de synthétiseurs, les dix compositions de Yes,U sont un véritable régal pour les oreilles et témoignent des progrès effectués par un groupe qui se bonifie au fil des ans.