What We Drew
Yaeji
Sortie en plein confinement, la première mixtape de Yaeji s’est avéré être l’album parfait pour se lover dans un cocon protecteur bien à l’abri des turpitudes sur les masques FFP2. Que ce soit pour ses chuchotements parfois très proches de l’ASMR ou par ses émanations de chillwave, ce projet contraste avec les influences beaucoup plus club de ses premiers pas dans la musique en 2017 - comment oublier "raingurl"? Laissant de côté son image de « party girl hyper fun », la coréano-américaine récemment signée chez XL Recordings se montre désormais sous un angle plus introspectif et touchant, comme pour souligner l’importance de la solidarité et de la bienveillance en cette période trouble.
Connue pour sa discrétion (« February 2017 » sur l’album de Charli XCX est un de ses rares featurings), mais aussi et surtout pour son côté décalé, Yaeji nous régale une fois de plus avec son goût pour le nonsense et l'humour pince-sans-rire. Au-delà de leur effet comique, des textes comme « I like pink, I like purple / Uh, you're a shurple (Maybe Steve Urkel?) » accrochent l’oreille, tout comme ces nombreux couplets en coréen dont elle adapte volontiers la prononciation pour mieux coller à l'ambiance du morceau. Mais derrière l'euphorie se cachent aussi les signes d'une crise existentielle que Kathy Yaeji Lee arrive à sublimer dans des morceaux incarnés avec une pudeur assez remarquable. « Waking Up Down » est à ce propos particulièrement touchant dans sa façon d'évoquer la lutte quotidienne de Yaeji pour sortir de sa léthargie matinale, tandis que des mantras légèrement flippants sur les morceaux « My Imagination » et « These Days » renforcent encore davantage l’affection et l’empathie que l’on peut éprouver à l'égard de ce personnage particulièrement attachant.
L’atmosphère ouateuse et planante qui enveloppe le projet semble nous figer dans le temps, comme s’il nous offrait une parenthèse au sein de notre quotidien actuellement plutôt morose et avare en perspectives d'avenir. Véritable bouffée d’air frais dans nos univers désormais semi-confinés, What We Drew est le genre de produit riche en endorphines, et qui suscrite un enthousiasme qui mérité vraiment d'être célébré autrement que dans la solitude de son salon.