Wagonwheel Blues
The War On Drugs
Plutôt discret depuis la parution du Night Falls Over Kortedala du petit prodige suédois Jens Lekman, le label Secretely Canadian semble nous préparer un été des plus sympathiques, avec notamment la sortie en août du second album d’un autre talent découvert par le label basé dans l’Indiana, David Vandervelde. Mais avant cela, il va falloir se farcir un sérieux morceau, mais heureusement pas un de ceux qui compliquent la digestion. Il ne s'agira pas non plus du nouvel opus d'un des fers de lance du label comme Magnolia Electric Co ou Damien Jurado mais plutôt d'un groupe sorti de nulle part et qui porte le nom plutôt intriguant de The War On Drugs. Originaire de Philadelphie et tirant son patronyme d'une campagne féroce lancée dans les années 70 par le gouvernement de Richard Nixon pour contrer le trafic de drogue à l'échelle internationale, ce groupe formé de cinq membres et emmené par le chanteur Adam Granduciel vient grossir les rangs d’un label dont les choix artistiques ne sont plus à remettre en question.
Signé il y a quelques mois à peine, voilà donc que le groupe débarque avec Wagonwheel Blues, un premier album qui va à n’en point douter faire parler de lui en raison de ses nombreuses qualités, dont une capacité assez sidérante à réconcilier deux époques que bien des excentricités et des expérimentations séparent. L’ingrédient de base qui donne toute son âme à The War On Drugs n’est pas bien difficile à déceler : c’est dans l’americana tout ce qu’il y a de plus traditionnel (pensez à Bob Dylan pour le style narratif, mais aussi à Tom Petty ou Bruce Springsteen) que The War On Drugs puise ses matières premières. Cependant, plutôt que de se limiter à être un groupe parmi tant d’autres et risquer de sombrer rapidement dans l’oubli, le groupe a préféré prendre quelques risques et aller lorgner du côté de Brian Eno ou Animal Collective afin d’insuffler à ses compositions cette dose de folie et de fougue qui les rend instantanément originales et lui permet ainsi de faire le lien entre tradition et modernité sans que l’on ne flaire l’opportunisme à plein nez.
Aussi habile au petit jeu de la ballade hallucinée (« Show Me The Coast » et ses dix minutes de trip éthéré) que de la ritournelle enlevée (« A Needle In Your Eye #16 », qui pourrait avoir sa place sur le Neon Bible d'Arcade Fire), The War On Drugs séduit par sa capacité à alterner les changements de rythme et impressionne par un songwriting jamais pris en défaut. Inutile de vous dire que Wagonwheel Blues fait partie de ces disques que vous pouvez acheter les yeux fermés. Vous ne le regretterez pas.