Visions of a Life

Wolf Alice

Dirty Hit – 2017
par Victor, le 20 octobre 2017
7

Après avoir bien préparé le terrain à coups d’EP et de singles, le nouveau Wolf Alice est là, deux ans après un My Love Is Cool dont les excellentes ventes sur ses terres natales avaient vite fait d'élever le groupe au rang de next very big thing du rock britannique - on sait combien ils adorent ça. Si on avait comme tout le monde découvert les charmes du groupe par l'entremise de singles très efficaces comme "Moaning Lisa Smile", le groupe parvenait à nous surprendre là où on ne l'attendait pas, et montrait sur ce premier album des capacités à louvoyer, à tempérer ses ardeurs pour revenir encore plus fort. Bref à mettre leur musique en scène et en valeur. Cet engouement généralisé, c’est parfois beaucoup pour un jeune groupe dont la qualité première est la capacité à pondre des titres accrocheurs sans avoir l’air d’en toucher une. On était donc en droit de s’interroger sur les conséquences de cette ascension fulgurante, et avec Visions of a Life on a quelques pistes de réponse. 

Tout d’abord, on ne peut pas réellement parler de spontanéité poussée encore plus loin, pas plus qu’on ne peut parler de plus grande recherche, de plus grande intellectualisation. Simplement parce que Wolf Alice semble placer ces deux valeurs sur un pied d’égalité, sur ce nouvel album comme sur le précédent d’ailleurs. Si cela leur permet de se distinguer de la soupe pop-rock fadasse que nous servent certains groupes british (à tout hasard, Blossoms), les cataloguer comme simple « groupe à guitares au-dessus de la mêlée » serait réducteur. Car leur palette est bien plus large que la moyenne, et cette dernière s’élargit encore sur Visions of a Life

Large palette de sonorités, d’abord. Sur Visions of Life, on dépasse le strict cadre "indie-pop-punk" de My Love Is Cool pour jouer la carte du groove polissé façon Broken Bells sur « Beautifully Unconditionnal », pour donner dans la ballade christique sur « After The Zero Hour » ou pour ne pas choisir entre prog et psyché sur un « Visions Of A Life » qui évoque autant les Black Angels que les Smashing Pumpkins. Large palette dans le songwriting, ensuite. Visions of a Life dépeint toujours les émotions adolescentes et les petits évènements que la déformation juvénile extrapole en grandes épopées. On y parle de peur de l’échec, d’angoisse, de colère mais aussi d’insouciance et d’amour. On retrouve, par exemple, sur « Formidable Cool » un peu de la matière de « You’re a germ », où un mec attire une nana dans ses filets grâce à son charisme naturel puis s’en débarrasse sans scrupules. Les textes sont travaillés dans tous les sens et à travers tous les registres, du poème un peu nonsense au texte chanté-parlé en passant par les refrains hyper catchy.

Ces lignes donnent sans doute l’impression d’un éparpillement et d’un manque de vision globale, pourtant ce disque présente une certaine cohérence. Le fil rouge est bien visible: Wolf Alice se fait porte-étendard d’une jeunesse qui veut crier son existence. Et puis la voix d’Ellie Rowsell, à travers laquelle le groupe mène à bien sa mission, est quand même constante dans son timbre et dans sa qualité. Bref, sans vraiment changer de terrain de jeu ni trahir son identité, Wolf Alice a rajouté plusieurs cordes précieuses à son arc, et rien que pour ça, on peut être satisfaits.