Up From Below
Edward Sharpe & The Magnetic Zeros
« A new Arcade Fire is born ». C’est en ces termes que l’aimable personne en charge de la promotion du label Rough Trade s’est adressée à moi pour me décrire Up From Below, le premier album d’Edward Sharpe & the Magnetic Zeros. Or, on le sait, comparer aujourd’hui une formation débutante au monstre canadien peut se révéler être un cadeau empoisonné tant le groupe reste à l’heure actuelle intouchable dans sa catégorie et, plus inquiétant, a enfanté un nombre assez phénoménal d’ersatz fatigants pour une poignée de groupes capables de soutenir la comparaison sans jamais atteindre le degré de maestria de la bande emmenée par Win Butler et Régine Chassagne. Mais la bonne nouvelle, c'est que dans une course où les Canadiens font clairement figure d’Usain Bolt, Edward Sharpe et ses Magnetic Zeros semblent, avec ce premier album, pouvoir jouer les Tyson Gay ou les Asafa Powell.
Mais avant d’aller plus loin, notons toutefois ceci : si les ressemblances avec Arcade Fire sont parfois patentes, notamment sur le titre qui ouvre Up From Below (« 40 Day Dream », poignant d'intensité), il serait vraiment dommage de limiter les influences du groupe emmené par Edward Shape – de son vrai nom Alex Elbert – aux Canadiens qui font hurler les foules dans une communion presque chamanique. Ajoutez plutôt un soupçon d’Architecture in Helsinki pour l’aspect déluré et presque ludique de leurs petits jeux entre amis et une pincée de Devendra Banhart pour le côté « communauté hippie » qui voit le groupe parcourir les États-Unis dans un vieux bus peinturluré et vous serez un peu plus proches de la réalité. Douze titres, c’est donc ce qu’il nous est donné de découvrir sur Up From Below, et comme on vous l’a brièvement annoncé plus haut, plein d'excellentes choses à vous mettre sous la dent. Groupe à géométrie variable composé le plus souvent d'une bonne dizaine d'âmes, Edward Sharpe & the Magnetic Zeros prennent un malin plaisir à jouer sur de nombreux terrains, se sentant à l’aise tant sur les ritournelles enjouées mélangeant allégrement pop, folk et gospel que sur les ballades saisissantes de simplicité et de délicatesse – et notamment lorsque le monologue devient un dialogue avec Jade Castrinos, comme sur « Home ».
C’est bien connu, les raisons de détester les hippies sont nombreuses. Ces mecs se foutent de tout, y compris de leur hygiène corporelle, sont d'une mollesse exaspérante et vous sortent des théories fumistes sur la gestion et l’organisation de notre belle planète. Par contre, il vous sera bien difficile de ne pas tomber sous le charme du folk foutraque et habité d’Edward Sharpe et de ses Magnetic Zeros. Fait de bric et broc, enregistré avec les moyens du bord sur du matos plus âgé que le groupe et dégageant une exaltante odeur de fraîcheur, Up From Below est de ces albums qu’il serait de mauvais ton de laisser végéter dans la catégorie "sous Arcade Fire" tant la formation américaine semble détenir suffisamment de talent pour s'imposer durablement dans notre paysage musical.