Ultraviolet
Kylesa
Savannah. Voilà une jolie petite ville (enfin 136.000 habitants quand même) de Géorgie américaine qui, si elle vous dit quelque chose, fait sans doute de vous un fan de sludge. Un genre qu’on associe généralement au Deep South et à la scène de la Nouvelle-Orléans. Il est d'ailleurs étonnant qu’une ville proportionnellement bien plus petite et pépère que la célèbre NOLA ait engendré quasi simultanément des groupes tels que Kylesa, Baroness et Black Tusk. Les deux premiers sont les plus célèbres et incontestablement les plus intéressants, avec une mention spéciale à Baroness qui, en changeant de braquet de manière assez couillue et risquée avec son double Yellow & Green a tout simplement produit un des meilleurs albums de l’an dernier, un disque dont on n’a toujours pas exploré toutes les profondeurs. Kylesa est un peu dans ce trio le gardien du temple, avec un son et une approche qui évolue lentement et sans rupture au fil des albums. Toutefois, Laura Pleasants (guitare, chant) avait annoncé pour Ultraviolet un album plus sombre et froid, et force est de constater que c’est bien le cas. Ultraviolet présente des morceaux moins directs que Spiral Shadow ou Static Tensions et qui demandent plus d’écoutes avant de totalement se livrer. Les sonorités, à l’instar du superbe « Unspoken » sont parfois presque aquatiques, d’une eau que l’on devine froide et peu limpide. Un bayou polaire d’où l’on verrait émerger des créatures et des ombres peu engageantes.
Une des particularités du combo est le fait qu’il comporte deux batteurs comme les Warlocks ou le Trail of Dead des débuts. Ce qui se remarquait plus sur les précédents albums ne frappe pas particulièrement ici, mais ajoute une épaisseur et une lourdeur supplémentaire au son. Les guitares sont toujours aussi crades et on alterne entre morceaux courts et bruts et titres plus lents sur des rythmiques vicieuses et rampantes. Le chant alterne entre les voix de Laura Pleasants et Philip Cope, ce dernier assurant le plus souvent les growls tandis que sa comparse se charge plutôt des parties en chant clair. Une formule qui donne un son assez identifiable et qui joue sans doute pour beaucoup dans l’intérêt du groupe ainsi que sa capacité à délivrer des riffs puissants servis par une section rythmique on ne peut plus efficace. Ce qui fait également le charme de Kylesa, c’est ce subtil (quoique le terme n’est sans doute pas des plus adéquat) mélange des genres, infusant stoner, crust, hardcore, psychédélisme et même cold wave dans son sludge pour un mélange étant plus proche du guarana-vodka que de la verveine-camomille. Au final cela nous donne un album moins rageur que ses prédécesseurs, jouant plus sur les ambiances et empreint d’une tristesse et mélancolie qui apporte une nuance supplémentaire que l’on ne connaissait pas encore dans la palette du groupe.