Ultra
Zomby
Depuis Where Were You in ’92?, Zomby a passé son temps à jouer avec nos nerfs : Dedication était aussi frustrant que génial et With Love tenait plus de la collection de morceaux que du vrai double-album avec son tri par ordre alphabétique. Et pourtant, Justin Moulds est toujours aussi bankable : après des passages sur les grosses machines indé 4AD et XL Recordings histoire de vendre la bonne parole dubstep à une époque où tout le monde voulait manger sa part du gros gâteau, le fils prodige de la UK bass revient au bercail Hyperdub après une décennie en dehors de l’écurie londonienne. Mais loin d’être un retour aux sources, Ultra semble vouloir se démarquer du reste de sa carrière, avec des collaborations et des morceaux plus longs et plus aboutis, du moins sur le papier.
Dès la première écoute, on se rend en effet compte que Zomby semble toujours victime de troubles de l’attention et que la cohérence n’est pas vraiment quelque chose qui l’intéresse. À la manière d’un Actress, il semble volontairement saboter sa tracklist et ses morceaux, voire évoluer au même niveau de fumisterie que Darren Cuningham : il suffit pour s'en convaincre d’écouter la calamiteuse collaboration avec Burial, sorte de patchwork de fonds de tiroir et dont sortent du mix uniquement les gimmicks des deux producteurs (les voix filtrées, les craquements de disques et les airhorns à la con). Mais si l’on exclut ce "Sweetz" qui tient plus du vol en bande organisée que de la véritable collaboration, le reste des invités offre à des pistes vraiment intéressantes, à l’image du "Quandary", avec Darkstar, finement ouvragé et très léger dans sa composition.
Il reste également une "patte Zomby" (qui apparaît autant sur son œuvre en solo que sur les collaborations), même si celle-ci semble évoluer et s’affiner : les ambiances sombres et l’amertume quasi-emo demeurent mais la façon de l’exprimer évolue ; et si "I" ou "E.S.P" semblent échappés de Dedication, on n’avait jamais entendu de choses similaires à "HER" venant de la part de Justin Moulds. On n’ira peut-être pas jusqu’à dire que l’Anglais a mûri mais celui-ci semble un peu plus apaisé et en profite pour livrer son œuvre la plus aboutie et diverse jusqu’à présent.