Two Dancers
Wild Beasts
2009, une année comme les autres pour Domino, et une de plus à rendre la concurrence verte de jalousie. Au fil des ans, la maison installée à Londres a enchaîné les coups d'éclat et ils sont désormais rares ceux qui oseraient critiquer le label fondé en 1993 par Laurence Bell et Jacqui Rice et dont la première signature s'appelait Sebadoh – ce qui témoignait déjà du flair des deux zouaves à l'époque.
Je vous le disais donc, l'exercice 2009 est à nouveau placé sous le sceau de l'excellence pour le label, qui a enchaîné les grosses sorties quasi unanimement louées par la presse (Arctic Monkeys, Dirty Projectors, Animal Collective…) et les autres, plus confidentielles, mais néanmoins enthousiasmantes (Junior Boys, King Creosote, Jon Hopkins). C'est justement dans cette dernière catégorie qu'il convient de verser les Wild Beasts, quatuor originaire de Kendal, un coin paumé du nord de l'Angleterre jusque-là connu pour ses biscuits à la menthe et son tabac à priser. Mais une chose est désormais certaine: avec un album de la classe et du raffinement de Two Dancers, la ville dispose d'une nouvelle corde, plus sexy celle-là, à son arc.
Dans le cas des Wild Beasts, il convient de ne pas se fier aux apparences: malgré un premier album positivement accueilli mais loin d'être exceptionnel et leur look carrément passe-partout, ces quatre jeunes garçons pourraient laisser penser qu'ils se spécialisent dans un rock indépendant tout ce qu'il y a de plus commun et croulant sous le poids de ses influences – une affirmation que Two Dancers permet de réfuter sans la moindre difficulté. Certes on décèle ci et là des éléments qui nous permettent de déterrer les racines folk, new wave et post-punk qui ont permis l'éclosion de la formation , mais dans l'ensemble, Two Dancers est un disque qui arrive sans forcer à imposer une personnalité et une tonalité qui lui est propre. Petits joyaux de précision et d'émotion, les dix compositions de ce deuxième album témoignent d'une sensibilité à fleur de peau qui se trouve sa plus belle expression dans le vibrato ébouriffant du guitariste et chanteur Hayden Thorpe, dont les comparaisons avec un certain Antony Hegarty sont aussi fréquentes que justifiées.
Voyage envoûtant parsemé d'intenses sommets émotifs ("We Still Got The Taste Dancing On Our Tongues" ou "Hooting and Howling" s'il ne fallait en citer que deux), Two Beasts est de ces disques qui ne vous font pas instantanément crier au génie. Par contre, une seule écoute suffit pour comprendre que vous tenez là un objet spécial à de nombreux égards, et que les incursions futures dans l'univers du groupe révèleront leur lot de bonnes surprises et de détails savoureux. Bref, une vrai belle révélation comme on n'en fait plus assez souvent.