Trouble In Dreams
Destroyer
En publiant la chronique de Trouble In Dreams plus de six mois après sa sortie, on mesure à quel point Destroyer demeure un des secrets les mieux gardés de la prolifique scène canadienne. Mené par un certain Dan Bejar, membre éminent des New Pornographers, le projet n’en est pas pour autant à ses débuts, cet opus étant le huitième d’une série qu’on imagine encore longue. Et qui finira, on l’espère, par avoir un succès public…
Si la scène canadienne est d’une prolixité à toute épreuve, Dan Bejar y contribue très certainement puisqu’il mène de front toute une série de projets (Swan Lake, New Pornographers,…). Mais c’est sans doute au sein de Destroyer que l’artiste donne la pleine mesure de son talent. Comme sur le dernier Destroyer’s Rubies qui a reçu un accueil favorable dans nos contrées sans pour autant permettre au groupe d’atteindre un seuil de notoriété suffisant. D’ores et déjà, on peut dire qu’il en est de même pour cet album qui, une fois encore dans le chef de Destroyer, n’a pas rencontré son public. La faute à d’incessants changements de labels, à une promotion insuffisante ou encore à des tournées plutôt rares en Europe ? Sans doute cela a-t-il son importance.
De l’œuvre de Bejar, on peut affirmer qu’elle est d’une constance à toute épreuve. Ainsi, ce Trouble In Dreams se situe dans la droite lignée de ses prédécesseurs. Ni plus, ni moins. D’emblée, on reconnaît le goût du Canadien pour les constructions tordues et alambiquées faisant place à des mélodies à tiroirs. À l’image de textes qui, eux aussi, relèvent d’une certaine forme de poésie débraillée. Jonglant entre acoustique et électrique, les compositions de Destroyer ne seraient rien cependant sans la voix nonchalante et maniérée de Dan Bejar. De fait, le timbre de voix du natif de Vancouver apporte au projet une réelle touche personnelle et permet, par exemple, de le reconnaître entre mille. Si “Shooting Rockets (from the Desk of The Night’s Ape)” fait figure de pièce maîtresse de Trouble In Dreams, il n’en demeure pas moins que la plupart des titres valent le détour par l’emballement qu’ils proposent dans leur dernière ligne droite respective.
À l’instar de l’artiste américain Chad VanGaalen, dont le dernier Soft Airplane n’a guère fait parler de lui, Destroyer reste un groupe en marge de l’actualité. Malgré l’indéniable talent qui l’habite, rien ni personne ne semble en mesure de donner à cette formation l’éclairage qu’elle mérite. Alors, on se résoudra, tant bien que mal, à la garder pour nous et à espérer que pour son prochain essai elle trouve enfin le chemin vers la lumière. À moins que ce ne soit un éternel recommencement…