To Be Still
Alela Diane
Au rayon folk, le second album d’Alela Diane fait sans conteste figure de sortie incontournable de ce début d’année. Inutile de rappeler le choc que fut, pour beaucoup d’amateurs du genre, la découverte en 2007 de The Pirate’s Gospel. Enregistré quelques années plus tôt et resté dans un relatif anonymat aux États-Unis, ce premier effort connut le succès en traversant l’Atlantique et en rejoignant le catalogue du (presque) toujours excellentissime label Fargo, qui en écoula plus de 50.000 exemplaires. Dès lors, le retour de la jeune femme originaire de Nevada City était attendu de pied ferme, avec un brin de fébrilité.
Ce qu’on aimait par-dessus tout sur The Pirate’s Gospel, c’était son caractère intemporel. Sorti de nulle part, il nous faisait marcher dans les traces d’une Karen Dalton et de toute une frange du folk féminin. Avec une voix racée, tout simplement unique, et accompagnée d’une seule guitare, Alela Diane avait le don de faire mouche à travers de compositions datant de quelques années et qui ne reflétaient déjà plus son état d’esprit. Entre ses incessants allers-retours aux États-Unis et l’escapade au sein du projet Headless Heroes, la Californienne a trouvé le temps d’enregistrer To Be Still, au départ à Portland avant de le terminer dans le studio de son paternel à Nevada City. Entourée par ses proches (son père, ses amies Mariee Sioux et Alina Hardin, son ex-prof de violon), par Otto Hauser (Vetiver) voire par le vétéran Michael Hurley, Alela Diane nous offre avec To Be Still un album aux arrangements luxuriants, ceux-ci prenant une dimension toute particulière au regard du dépouillement de The Pirate’s Gospel. Fluide et homogène, ce second effort nous confirme que la jeune femme possède l’une des plus belles voix à l’heure actuelle et que son talent de songwriter, dans la droite lignée du folk de la fin des 60’s – du début des 70’s, n’est pas des moindres. En somme, la principale nouveauté de cet opus réside dans le tapis sonore (composé de violon, de pedal steel, de banjo, de mandoline, de percussions) sur lequel se languissent les compositions.
Au bout du compte, on tient en To Be Still un travail bien fait, tel qu’il serait réalisé par une première de classe. Mais il apparaît très vite que ce nouvel album n’est pas empreint de la beauté extatique de son prédécesseur ni même de la mythologie de ce dernier. À peine remis du choc de choc de la découverte d’Alela Diane, qui date tout de même d’à peu près un an et demi, cet effort arrive sans doute trop tôt que pour être savouré à sa juste valeur, d’autant que sa production léchée lui confère ce cachet un rien trop actuel et que l’on ne retrouvait pas sur The Pirate’s Gospel. Ceci dit, on notera surtout qu’Alela Diane passe le cap du second effort avec succès – il était impossible de reproduire le coup du premier – et que celui-ci lui ouvre grand la porte à une carrière dont on ne doute un instant qu’elle sera encore jalonnée de sommets.