Time Is Over One Day Old
Bear In Heaven
Bear in Heaven fait partie de ces groupes qui ont indubitablement bénéficié d'un crédit critique très élevé (Best New Music par Pitchfork pour leur très réussi second album Beast Rest Forth Mouth) mais dont le succès est malgré tout resté confiné à la caste plutôt restreinte des branleurs de la musique tels que nous-même. Tant mieux pour eux, ils décevront d'autant moins de gens avec leur quatrième album.
Car oui, disons-le tout de go, l'album n'est pas bon. Pas suffisamment mauvais pour s'amuser à le descendre en flèche, pour parler de ratage complet avec emphase et exagération comique, mais quand même bien trop imparfait pour qu'on puisse en dire du bien. Sans doute ont-ils voulu partir à la conquête du grand public, avec un disque où tout est plus propre, plus sage, plus joli. Mais en chemin, ils ont perdu leur identité et leur pertinence. D'un rejeton de Animal Collective, Grizzly Bear ou même Vampire Weekend, on est passé à une espèce de sous Arcade Fire (ou tout autre groupe de pop FM) mâtiné de dream-pop.
Ce serait juste une déception si le résultat bénéficiait de l'efficacité pop recherchée. Il n'en est rien, et la majeure partie des titres tournent à vide autour de chorales de voix plus exaspérantes qu'envoutantes ("Dissolve the Walls"), de riffs de guitares paresseux ("Time Between") ou de basse au groove anémique ("If I Were To Lie"). Les réminiscences kraut des premiers disques se font trop discrètes et rares ("Autumn", "Demon"), et ne réussissent donc pas à relever le niveau d'intérêt, encore moins celui d'adrénaline. Rien n'est dérangeant, certes, mais on a du mal à sortir de la torpeur dans lequel ce disque nous plonge
C'est peut-être dans le dernier morceau "...You Don't Need The World" qu'on entrevoit la lumière : le côté tribal/chamanique qui sous-tend l'album apparaît ici plus clairement. Le morceau est entêtant, et peut faire penser aux productions de Boom Bip (époque Blue Eyed in the Red Room). Peut-être Time Is Over One Day Old est-il un album de transition qui va permettre à Bear in Heaven de passer à autre chose, comme la plupart des groupes pop psychédélique de la fin des années 2000. En attendant, il vous faudra vous contenter de ce disque sans intérêt, ou simplement l'ignorer et revenir dans quelques années.