Thomas Köner
La Barca
Croyez-le ou non, chaque fois qu’il s’agit d’écrire sur un disque ou sur la carrière de Thomas Köner, nous avons les mains qui tremblent. Tant de choses à dire, mais surtout un travail qui amène les oreilles trop loin, dans trop de rêve, dans trop de paysages desquels on ne voudra jamais revenir. Il ne s’agit pas ici d’une tentative grossière de vous attirer dans nos filets avec l’une ou l’autre affirmation miteuse. Non, on a vraiment des frissons aux testiboules quand on prend le temps d’écouter l’Allemand. Car il faut s’asseoir, souvent, et se caler dans des endroits absolument silencieux pour apprécier la science du producteur. Spécialisé dans l’utilisation du silence, Köner travaille l’ambient et le sound-design avec une attention plus que méticuleuse, sorte de croisement parfait entre le field recording de Chris Watson (allez écouter le triptyque Nunatak/Teimo/Permafrost, vous nous raconterez la claque) et l’articulation du silence de Mika Vainio dans des œuvres littéralement trop belles pour être véritablement décrites sur papier.
On fera donc court, La Barca est l’une des plus belles œuvres de l’Allemand (la plus accessible aussi), enregistrée lors d’un tour du monde de deux ans (des field recordings en provenance de Hambourg, Nice, Rome, Manhattan, Barcelone, Buenos Aires, Jérusalem, Le Caire ou Athènes), et trouvable uniquement à des prix exorbitants. Cette réédition en format digital est donc la bienvenue puisque pour seulement 8 euros, vous vous offrirez la version totale de l’œuvre, à savoir les douze titres de la version CD, les cinq titres supplémentaires compris sur la version LP et cinq inédits. De plus, vous aurez droit au reportage vidéo retraçant ce voyage musical aux quatre coins du monde. Pour ce qui est de la musique, partez donc à la découverte de ces vingt-deux titres, et vous reviendrez nous serrer la pince en chantant. Car il est difficile de trouver aujourd’hui, même quatre ans après, pareil recueil de voyage musical, d’horizon auditif et de jeu sur la mélancolie. Histoire de pleurer dans son canapé, de faire l’amour en tremblant, de se lever et de se dire que la vie, finalement, ne reste jamais que ce qu’on décide d’en faire.