The Vinyl Collection
Various Artists
Alors que la clique à Pedro Winter (Ed Banger) ou encore la petite bande à Surkin (Institubes) mène toujours les débats avec force au cœur de la scène eurotrash, on aurait presque tendance à oublier que certains îlots de résistance demeurent encore inébranlables malgré l’hégémonie des labels précités. Plus encore que Modular, Citizen Records fait désormais office d’outsider méritant. Et il faut se rendre à l’évidence, si le label de Vitalic se démène avec force pour garder une ligne de conduite irréprochable, les artistes qui y sont hébergés ne connaissent pas de gloire immédiate, du moins pas en adéquation avec la grandeur de leurs talents. Difficile donc, dans un climat propice à la hype, d’y voir une quelconque viabilité à long terme. Faux, car c’est bien là que le miracle apparaît.
Car Citizen, c’est clairement la hype sans son côté cannibale, le versant bruitiste de l’electro-glam actuel sans l’autodérision imbécile de ses principaux acteurs, c’est finalement la noblesse du genre qui explose au cœur même d’un label. Noble donc. La compilation en présence en est l’expression la plus simple. Quoi de mieux pour la cause que de redécouvrir la hype intelligente au travers d’un large panorama des titres qui ont pu faire la gloire de Citizen au cours des quelques années qui nous ont précédés. Un travail de titan qui se résume en quinze pistes rutilantes, voire décadentes, faisant la synthèse a posteriori des trois dernières années d’activité qui ont contribué à l’ascension de cette écurie.
Autant le dire tout de suite, on aime se faire balader d’artistes en pistes pour y découvrir un tableau complet de personnalités sensiblement opposées au premier abord. Premier coup de génie donc : conserver au sein du label même une diversité des styles, un éventail des genres qui aura la vertu d’esquiver une certaine tendance mécanique que l’on peut aisément retrouver chez les autres labels de cette scène, qu’ils soient français ou allemands. Ainsi, on verra évoluer les rois du cut-up Teenage Bad Girl aux côtés du plus raffiné Matzak (jeune loup qui ne cesse de faire des émules dans un genre plus progressif, et dont nous vous conseillons l’excellent Life Beginnings paru sur Boxer), ou encore de voir Remote nous balancer un groove sexuel sur fond d’electro carrément darky aux côtés d’un Terence Fixmer (ou encore John Lord Fonda) poussant les guitares à saturation sur des kicks à tendance banger.
Deuxième coup de génie : là où le monde électronique à tendance hype s’évertue encore à tenter de reproduire un electro-rock poisseux du fait de son absence de guitares (Justice en tête, osant sans vergogne se révéler autant de Metallica que des Jacksons 5), la joyeuse bande à Vitalic s’emploie à respecter autant que possible les sous-genres qu’elle prétend servir, trouvant dans un certain recul l’occasion de créer de véritables titres electro-rock à tendances discoïdes. A partir de là, il ne fait nul doute que la hype s’impose d’elle-même, et en devient même véritablement addictive (chose suffisamment rare pour être mentionnée).
Pas de calcul mercantile, Citizen ne prendra définitivement jamais les kids pour plus bêtes qu’ils ne le sont. C’est dans ce climat de sérénité créative, de liberté d’action que le label prend toute son envergure en déployant des ailes, si pas plus grandes, bien plus belles que leur collègues de labels, d’où qu’ils soient. Fini donc le statut de meilleur espoir, il est temps que Citizen s’ouvre pleinement au monde qui l'entoure, ou plutôt que ce petit monde aveugle reconnaisse avec logique que le talent ne se trouve pas toujours dans les plus grandes vitrines. Don’t Believe The Hype.