The Stygian Rose
Crypt Sermon
Une des discussions entourant mon retour au sein de la rédaction avec mon fidèle ami et rédacteur en chef nous a rapidement amené sur l’opportunité ou non de dédier un format aux genres musicaux considérés (à tort ou à raison) comme extrêmement niche. Une foule de lecteurs seraient donc désorientés au moment d’entendre leur rédacteur préféré évoquer du « prog/sci-fi death », du « frapcore » ou de la « minimal synthwave ». Et, quelque part, on les comprend, même s’il ne fait nul doute que nos tentatives de gloser de la chose musicale avec précision est aussi ce qui constitue un des atouts forts de notre media.
Au cours de la quarantaine d’écoutes obsessionnelles de ce The Stygian Rose depuis sa sortie, j’ai retourné la chose dans tous les sens afin d’identifier l’angle d’attaque qui siérait au mieux à cette trop courte chronique. Je pourrais parler des thèmes intensément bibliques de ces six titres (tant au niveau de l’historiographie, de l’orientation des textes que de l’esthétique), de sa filiation avec Dark Descent Records et de tout l’amour qu’on peut porter à cette grande famille ou de sa généalogie dans le grand arbre des genres métalliques. Et si je m’en tiens à mon premier paragraphe, il s’agira de faire simple, sans équivoque. Du lisible pour que tout le monde comprenne bien de quoi on parle.
Crypt Sermon nous vient de Philadelphie et est un mélange parfait de ce que Mastodon et Iron Maiden ont pu sortir de meilleur dans leur carrière. Voilà, chronique terminée, vous savez donc que The Stygian Rose est par définition une des meilleures choses que vous entendrez cette année.
Pour ceux qui voudraient aller un peu plus loin, on affinera notre propos en évoquant plutôt les références à Candlemass ou à Solitude Aeternus (tous deux partageant le même chanteur), sur une terre epic doom complètement lyrique. The Stygian Rose c’est quarante minutes d’aventures chevaleresques racontées par un barde aux airs graves et superbement incarnés dans une taverne de l’Ouestfolde profond. C’est du feu d’artifice heavy metal constant sur fond de groove doom metal sludgisant ; c’est du sing along théâtral qui s’accompagne de grands gestes de la main ; c’est la justesse d’un son tendu et rentre-dedans au contact de langueurs prog multicolores, réalisés par des musiciens beaucoup trop bien calés.
The Stygian Rose ne peut d’ailleurs s’envisager qu’au sommet d’une montagne ou sur un cheval au galop monté sans selle. Il est un hymne aux cheveux dans le vent, à la capacité de casser des gueules avec une plastique irréprochable dans une armure de cuir magnifiquement tanné. Il est mystique et indomptable, fier et complexe dans ses arrangements. Un disque de musiciens, qui te fait bouffer de la guitare charnue et parfaitement véloce par bennes entières, pour qui le tout-mélodique ne peut s’envisager sans son chargement complet de riffs va-t-en-guerre et de gimmicks au guarana. Un disque entre la parade militaire, la chanson de geste et la bagarre acharnée dans des bars d’autoroute. Il y a un monde où The Stygian Rose fait tout de travers et passe à côté de son sujet. Ici et en 2024, Crypt Sermon nous sort sans trop de doutes le banger doom metal de l’année.