The Greenhouse Effect Vol. 3
Asher Roth
Asher Roth aimait tellement l'université qu'il a décidé d'y retourner 11 ans après la sortie de "I Love College" et de son album Asleep in the Bread Aisle, première déception d'un de ceux qui, à l'époque, était censé devenir l'une des têtes d'affiche de ce rap jeu.
Tout commence en 2007 lorsque MySpace fait de lui une sensation, car son aisance dans l'exercice rap décontenance. Asher Roth est "nice", son flow est fluide comme Rohff, cool comme Doc Gyneco et, petit détail qui semble être une montagne pour d'autres, Asher Roth est blanc comme... Eminem évidemment. La comparaison aurait dû s'arrêter là, car Asher Roth n'a jamais revendiqué venir de Detroit, insulté sa maman ou imaginé buter sa femme sur un son. Sa première mixtape, Greenhouse Effect Vol. 1, prouve son potentiel, sans oublier de s'accompagner de la mention débile "Hotter than Eminem" lors de sa sortie.
Asher Roth n'avait bien sûr absolument rien à voir avec Eminem, et même si sa première mixtape était de bonne facture, le comparer au Eminem pré-Recovery revenait à peu près à comparer Zinédine Zidane à Marvin Martin ou à Camel Meriem. D'ailleurs, que sont-ils devenus, Martin et Meriem ? Si Goûte Mes Disques était SoFoot, on aurait pondu un long papier pour détailler la tragédie de leurs trajectoires, mais ici c'est Goûte Mes Disques, donc on va se tenir à l'autre côté de la comparaison. Qu'est devenu Asher Roth, donc ? Fatigué d'être contrôlé par une industrie qui ne comprenait rien à sa démarche, le natif de Pennsylvanie a très tôt décidé de faire cavalier seul, à la suite de la sortie de Asleep in the Bread Aisle en 2009 et des retours mitigés sur ce dernier, et ainsi de voguer en indépendant. Il faut dire aussi que personne ne l'a retenu, et que son absence n'a pas laissé un vide intersidéral. Une petite décennie et quelques projets plus tard, Asher Roth s'est improvisé une coupe de cheveux de rescapé du Vietnam et a solidifié sa fanbase, à défaut de l'élargir. Loin d'un semblant de spotlights qu'il avait avec "I Love College", Asher Roth se contente de ce qu'il a, et entreprend l'élaboration de The Greenhouse Effect Vol. 3.
Déjà en 2007, une certaine sympathie émanait d'Asher Roth qui jouait à fond le rôle de l'universitaire fêtard, génial dans l'exercice rap. Plus de dix ans plus tard, le rappeur a au moins gardé cette sympathie naturelle. Mieux que ça, ses followers participent activement à l'élaboration du Greenhouse Effect Vol. 3 grâce à une chaîne Discord. Le concept est simple : Asher Roth et ses invités postent leurs acapellas, et les producteurs les plus chauds de sa fanbase concoctent les beats pouvant coller aux voix et aux discours. Un projet simple en apparence, d'autant plus qu'un vrai fan est certainement le producteur le plus fiable possible pour un MC. Alors oui, Asher Roth n'a pas la fanbase de Drake, mais on peut imaginer qu'il a néanmoins été complexe pour lui de faire le tri parmi les nombreuses pistes qu'il a dû recevoir.
Au final, de quoi parle The Greenhouse Effect Vol. 3 ? Ceux qui avaient connu Asher Roth par le passé doivent savoir que ce dernier était un expert en rimes triviales mais cool. Asher Roth pouvait faire l'éloge des ailes de poulets ou vanter ses skills à Mario Kart sans jamais être (trop) chiant. Dans ce projet, RetroAsh embrasse cette trivialité en créant un huis-clos universitaire, où lui joue le rôle d'un professeur d'horticulture, qui se révèle être un expert en culture de cannabis. Les autres intervenant sont quant à eux les élèves du professeur qui ne pensent qu'à s'enfumer le crâne et à se faire des gros sous le plus vite possible. Au professeur Asher d'expliquer à ces Koba LaD en puissance que, comme une plante, il faut prendre le temps de grandir pour s'épanouir dans le futur...
Comme une séquence du Coffee and Cigarettes de Jim Jarmusch, ce Greenhouse Effect Vol. 3 est trivial; tantôt chiant, tantôt brillant, il ne manque jamais de bons sentiments. C'est évidemment un plaisir de retrouver le timbre de voix si doux d'Asher Roth et son attitude laidback qui nous avait tant fasciné à l'époque. Certes, on comprend vite qu'il n'a rien d'exceptionnel à nous proposer. Mais ce projet est cool - franchement oubliable aussi, mais peu importe. Pour un artiste comme lui, l'important n'est pas nécessairement dans la postérité, mais dans l'appréciation de l'instant présent.