The Course of the Inevitable
Lloyd Banks
« G-G-G-G-Unit !» fait partie des cris de guerre mythiques de notre jeunesse. On ne va pas se mentir : n’importe quel babtou fragile piqué au rap des années 2000 s’est senti pousser une paire de couilles en écoutant « Poppin’ Them Thangs » et « Stunt 101». Et même si la nostalgie fait toujours effet, cette époque est aujourd’hui révolue ; après tout, cela fait plus de treize ans que 50 Cent, Tony Yayo et Lloyd Banks ont officiellement dissout le mythique collectif derrière Beg For Mercy.
Tandis que 50 Cent s’est lentement mué en influenceur / businessman, et que Tony Yayo a tout simplement disparu de la circulation, Lloyd Banks a continué son petit bonhomme de chemin. Pour autant, son dernier projet en date, Halloween Havoc 3 : Four Days of Fury, est passé totalement inaperçu en octobre 2016. Certains curieux pouvaient alors spéculer sur une retraite anticipée - et bien méritée. mais c’est mal connaitre le vieux dinosaure du Queens, qui est simplement resté tapi dans l’ombre de son studio pour peaufiner son retour. Il est vrai que personne n’attendait particulièrement ce The Course of the Inevitable, et pourtant…
Dès les premières notes de « Propane », on retrouve ce timbre de voix rocailleux qui nous plonge immédiatement dans une ambiance macabre, qui enveloppera d'ailleurs tout le disque. On se sent comme transporté dans un New-York violent et imprévisible : les lumières s’adoucissent, la nuit tombe et les démons sortent de leur taverne. C’est dans cette atmosphère lugubre que le rappeur de 39 ans excelle, et qu’il déploie tout son savoir-faire – « Won’t be no sympathy for you, to say the least / They made the sidewalks for chillin’, stay out the streets » rappe-t-il sur « Sidewalks », qui résonne comme un avertissement à ceux qui auraient le malheur de le croiser dans son Queens natal.
Le disque vient accompagné d’une liste d’invités cohérente, et l’enchainement des featurings de Freddie Gibbs, Roc Marciano et Benny The Butcher sert autant à rassurer les mauvaises langues qu'à confirmer la capacité de Lloyd Banks de plaire à toute une nouvelle génération de MCs bercés au son du G-Unit. Aussi inattendu que qualitatif, The Course of the Inevitable transpire l’authenticité d’un MC qui est toujours resté un putain de gangster dans l’âme. En réalité, le seul bémol se situe au niveau de la longueur du disque - dix-huit titres, mais quand comprendront-ils ? Douze ou treize titres auraient amplement suffi et, fatalement, certains morceaux deviennent dispensables – de « Break Me Down » à « Drop 5 », on se situe clairement dans le ventre mou du projet. Il faudra l’intervention parfaite de Sy Ari Da Kid pour repasser la seconde, et redonner un peu de couleur à la fin du disque, qui termine sur les formidables « Dishonorable Discharge » et surtout « C O T I », sur lequel Lloyd Banks déploie un flow tranchant et diablement efficace, qui conclut le disque sur une note impeccable et vient confirmer ce que l'on savait déjà : Lloyd Banks, c’est un peu le rappeur préféré de ton rappeur préféré. Un vrai vétéran qui, après avoir tout connu au début de sa carrière, se fait plaisir en fricotant avec cet underground qui convient à cet univers sombre, mélancolique et menaçant qui lui va si bien.