The Chaos
The Futureheads
On dit souvent qu'une carrière, ça ne tient pas à grand chose. Dans le cas des Anglais des Futureheads, il leur aura manqué un single. Pas un bon titre, non, ça ils en produisent à la chaîne depuis belle lurette. Un single, un vrai, du genre qui inonde les radios quelques semaines durant, qui garnit les classements de fin d'année ou qui sert d'accompagnement sonore aux campagnes publicitaires d'un grand opérateur télécom.
Malheureusement, en dix années d'une carrière pourtant impeccable, le groupe de Sunderland n'a jamais été en mesure de récolter plus que les lauriers de la presse indépendante ou de la blogosphère et est donc injustement considéré comme un second couteau de la scène rock anglaise. Pourtant, quand on voit le nombre de groupes moyens qui, par la grâce d'un ou deux singles puissants et taillés pour les masses, ont été élevés au statut de household name (qui a dit Maxïmo Park, Gossip ou MGMT?) malgré une discographie qui n'a rien de populaire et/ou exceptionnel, il y a de quoi perdre le peu de confiance qu'il nous restait dans l'amateur lamba de rock à guitares sans chichis. Parce que oui, une fois de plus, les quatre lads de Futureheads ont accouché dans la plus grande discrétion d'un album d'une qualité supérieure, qui enchaîne les brûlots post-punk/pop avec une aisance exceptionnelle, mais dont tout le monde risque de foutre, lui préférrant le Congratulations de MGMT auquel il n'auraient même pas jeté une oreille distraire si « Kids » n'était pas passé par là deux ans plutôt.
A ce stade, il semble évident que les gars des Futureheads sont indifférents à un tel état de fait, conscients que sans ce tube ultime qui leur ouvrirait les portes de la Brixton Academy ou la une du NME, il n'atteindront jamais le niveau de popularité des regrettés Rakes ou de Bloc Party, pour citer deux groupes avec qui les parallèles semblent évident à l'écoute des onze titres de The Chaos. Alors plutôt que de perdre leur temps et leur énergie à se morfondre, le groupe des chanteurs Barry et Dave Hyde insuffle son trop-plein d'énergie dans des compositions qui empruntent à Gang of Four l'amour du riff qui lacère et à The Jam la capacité de vous donner envie d'acheter un polo Fred Perry et d'aller faire le malin en sirotant des pints of lager dans le premier pub qui passe. Y'a pas à dire, tout les éléments sont réunis sur The Chaos pour en faire le genre de disque qui ne paie pas de mine mais qu'on ressort finalement plus souvent qu'on ne le pense de son armoire ou de son disque dur: il y a tout d'abord ces compositions qui se retiennent en quelques écoutes à peine (le premier single « Heartbeat Song » notamment), ces refrains à gueuler comme des putois avinés (mention spéciale à « Sun Goes Down ») et cette production carrée et efficace, oeuvre d'une autre paire d'artisans anglais honteusement sous-estimés, Youth et Dave Brewis des excellents Field Music.
Cet été, il n'y aura malheureusement pas beaucoup de place dans les festivals européens pour les gars de Futureheads qui, hormis une petite date à Dour, sillonneront inlassablement les routes de la perfide Albion à la rencontre d'un public qui, comme depuis trop longtemps, ne se déplacera pas dans des quantités représentatives des qualités du groupe. Bref, si vous lisez ce papier et que vous avez votre ticket pour Dour, vous savez déjà ce qu'il vous reste à faire ce vendredi 16 juillet...