The Bigger Artist
A Boogie Wit Da Hoodie
Fraîchement signé par Atlantic Records sur la seule base d'une mixtape extrêmement streamée, A Boogie Wit Da Hoodie avait pour but avec cet album de concrétiser une énorme année. La pochette de son premier projet le représentait comme le pantin d'une femme maîtrisant alors son esprit et sa musique, celle de The Bigger Artist ("Artist" étant son prénom) donne le ton : en une année, le garçon est devenu un homme, grâce à la naissance de sa fille et des responsabilités que celle-ci engendre, et a repris une maîtrise totale de sa musique.
Originaire de New York, A Boogie a dans son ADN le sang glacial de Beanie Sigel et Juelz Santana. Son insolence le fait briller dans une première partie d'album au débit plus élevé, et à la technicité plus léchée que sur le reste du disque. A Boogie nous agresse avec mélodie dans "Undeafeated" et nous frappe avec groove dans "No Comparison", faisant par ailleurs preuve de sa grande technique vocale. On l'apprécie également lorsqu'accompagné de Don Q, (le meilleur rappeur du monde selon lui) les mélodies entêtantes de l'un viennent sublimer la bestialité de l'autre. A Boogie chantonne, Don Q mitraille. Quant à "Money Sprung", il est l'une des très bonnes raisons de garder un oeil très attentif sur l'entourage proche du natif du Bronx. L'arrogance, l'insolence, les bijoux exclusifs ne représentent cependant qu'une infime facette de l'Artist.
Comme sur sa première mixtape, A Boogie s'étale longuement sur son côté "homme à femmes", jouant les gros bras parfois, mais exposant sans trembler ses failles et ses doutes. Le "moule Drake" pour faire simple. Son style à la frontière du rap et du chant et sa science insaisissable de la mélodie offrent des moments intimes et complexes, sensuels et entraînants. "Get to You", parmi tant d'autres pistes, en est le parfait témoin. Ces morceaux plus confidentiels apportent un relief intéressant au personnage, mais la recherche du tube se fait parfois trop fortement sentir. On peut notamment se demander si les collaborations avec Chris Brown et Trey Songz étaient indispensables ? Forcément radio friendly, forcément plus impersonnels que les autres morceaux, ces wannabe hits ne servent à rien quand on a sorti l'un des meilleurs morceaux de l'année dès le printemps - "Drowning", avec son "labelmate" Kodak Black. Mais voilà, A Boogie semble concevoir tous ses morceaux comme des potentiels tubes. Une mine d'or pour les labels à l'heure du streaming, mais un énième rappel de la désuétude du format "album" aussi.