Talmud Beach
Talmud Beach
A chaque rédacteur ses règles d’or. L’une des miennes consiste à ne jamais négliger un disque débarquant dans ma boîte aux lettres et renseignant une date de sortie éloignée dans le passé et une origine un peu exotique. Il y a souvent de bonnes choses qui se cachent là-derrière. Pourtant, dans le cas des Finlandais de Talmud Beach, ce n’était pas gagné, avec leur album sorti en 2013 et disponible depuis peu chez nous. Signés sur Bone Voyage Recordings, label des hérauts nationaux de 22 Pistepirkko, ces barbus au look un peu bizarre donnent dans le blues comme on ne l’a sûrement jamais pratiqué dans les contrées éloignées dont ils sont originaires. Cette musique de noirs-américains se réincarne ici dans un groupe composé d’un blond maigrichon, du fils caché de Wild Oldham et Earl Hickey (vous savez, le slacker de la série My Name Is Earl), et d’un type au regard vide un peu flippant à qui vous ne confieriez certainement pas vos gamins pour le weekend. Pourtant, improbable sur papier, l’association de ces trois Finlandais accouche d’un premier album d’une sacrée élégance et respectueux de la musique des grands maîtres du genre. En effet, ici, l’intention n’est pas de se réapproprier un son pour le diluer dans une quelconque identité nationale qui, soyons honnêtes, n’est probablement pas prête à digérer les élucubrations du trio, aussi jouissives soient-elles. Non, le regard est ici tourné vers les rives brumeuses du Mississipi, sans oublier d’aller puiser l’inspiration du côté d’incarnations plus modernes du genre – on pense notamment à Canned Heat, ne serait-ce que pour le timbre de voix. Et il faut bien reconnaître que de ce travail de mémoire émergent onze titres à la beauté fuyante, onze mélodies qui en appellent aux écoutes répétées. Et qui surtout, donnent davantage envie de dirty south que de grand nord.