Take My Breath Away
Gui Boratto
Ce vent de fraîcheur remua pas mal de chapelles en 2007. Ce n'est pas si vieux mais on y pense déjà avec nostalgie : l'idée qui se propageait alors comme une tornade était que la minimale pouvait être hédoniste, que son apparente austérité pouvait se marier aux sucreries pop. C'est en plein là-dedans qu'est sorti Chromophobia, premier album de Gui Boratto. En disque porte-drapeau, il a joui d'une critique phénoménale. C'était la passion folle pour ce mélange très coloré de Villalobos et Death in Vegas. Avec un peu de recul, on constatait que Chromophobia était tout de même un disque assez faible ; quelques morceaux étaient très beaux mais les capacités du Brésilien paraissaient vraiment limitées : à part quelques paris mélodiques, l'ensemble s'avérait bien trop pauvre pour intéresser sur la durée.
Deux ans se sont écoulés et la désillusion pointe dangereusement. Honnêtement, cette mouvance minimal-pop a fait long feu. Les esprits se sont remis au dark, au cérébral. Seuls Kompakt et dans une moindre mesure Get Physical persévèrent dans cette voie. Dans ce contexte glissant, l'exercice du deuxième album trouvait pour Gui Boratto bien des raisons d'être redouté. Et son échec était presque programmé.
Take My Breath Away est en effet tout sauf une surprise, on le connaissait presque avant de l'avoir écouté. Toujours la même rengaine de rythmes trop peu appuyés, de montées progressives douteuses sur fond de mélodies chamallows. Le petit côté trancey made in Border Community a vraiment pris du plomb dans l'aile, et dans cet album il ne ressort que l'aspect dégoulinant – "Eggplant" est par exemple un supplice. Certains titres donnent envie d'être zappés illico ; dès leur intro on en devine le dénouement comme dans les pires comédies de moeurs.
Cette prévisibilité est la raison principale de ma désaffection. Take My Breath Away fait vraiment has been. Du reste, avec les premières chaleurs et les gourmandises de circonstance, il ne sera pourtant pas désagréable d'en entendre les rejetons les plus pop. Si Gui Boratto possède bien une qualité, une singularité même, c'est sa façon d'introduire la guitare. Sur "No Turning Back", un entêtant égrainage de notes façon New Order vient se boucler violemment dans notre esprit pour ne plus en ressortir. Ce n'est pas nouveau d'entendre ça, mais comme un sorbet de discount on ne crache jamais complètement dessus. À défaut de savourer une vraie glace artisanale, donc.