Sympathy for Life
Parquet Courts
Bientôt dix ans que les gars de Parquet Courts honorent leur statut de chouchoux discrets du rock indé. Un groupe sur lequel tu peux miser tes billes l’esprit tranquille, faisant sa vie entre pop fourre-tout et post-punk gentiment braillard tout en fournissant aux salles de taille moyenne l’assurance d’afficher complet sans trop se fatiguer.
La sortie de Wide Awake en 2018 a quelque peu modifié leur trajectoire, les propulsant dans bon nombre de tops de fin d’année alors qu’ils n’avaient pas forcément anticipé ce coup de chaud. Ce succès tardif, on l’attribuera avant tout à leur aptitude à pondre des morceaux aussi imparables que "Total Football" ou "Tenderness" mais aussi, dans une moindre mesure, à la production de Danger Mouse venu déverrouiller un groove trop peu exploité jusqu’alors. Le titre "Wide Awake" en est d’ailleurs le meilleur exemple, avec son déluge de cowbells qui semble s’échapper du catalogue de DFA Records. Trois ans plus tard, les New-Yorkais donnent l’impression d’avoir pris goût aux tours de bassin puisque leur Sympathy For Life se fait clairement la malle sur le dancefloor.
Conçu à huit mains par, d’un côté, Andrew Savage et Austin Brown qui tiennent la barre du groupe depuis ses débuts et de l’autre, les producteurs Rodaidh McDonald (The xx, The Horrors, Vampire Weekend, Hot Chip) et John Parish (PJ Harvey, Aldous Harding, Dry Cleaning), Sympathy For Life présentait a priori peu de chance de se vautrer. Tandis que les premiers s’affairaient à fourbir leurs textes et leurs mélodies, les seconds s’évertuaient à transposer du mieux possible des idées embuées par le LSD (nous n’inventons rien, Savage relatant lui-même une routine d’écriture à base d’exercices physiques et de psychotropes).
« I'm making plans for the day all of this is through / Seeing my path there, hearing the song I'll sing / And food that I'll taste and all the drinks that I'll consume / Return the smile of an unmasked friend »
On ne pouvait espérer meilleure entrée en matière que ce "Walking at a Downtown Pace". Ce cri du cœur post-covid (ou presque) paraît siffler officiellement la fin de l’hibernation même si, selon l’admission de Savage, il aurait été composé en 2019, bien avant le début de la pandémie. Cette clairvoyance…
Les pièces de résistance interviennent à mi-parcours avec "Plant Life", qui déroule une improvisation bien détendue du Speedo dans une ambiance paillote et marie-jeanne, et "Application/Apparatus" qui débride les synthés pour tendre l’élastique jusqu’à son point de rupture. Deux mises en jambe que ne renierait probablement pas Primal Scream période Screamadelica (celle que tout le monde a retenue donc).
Il y a également beaucoup de Talking Heads dans cet album. "Marathon for Anger", "Sympathy for Life", "Zoom Out"… La référence s’affiche souvent en néon mais on ne s’en plaindra pas plus que ça. Il n’y a jamais assez de Talking Heads dans nos vies. Et puis, quand on est originaire de New-York et qu’on tente de faire remuer ses guitares avec un minimum d’intelligence, l’ombre de David Byrne ne plane jamais très loin.
Malgré des passages plus paresseux ("Black Widow Spider" ou encore "Just Shadows"), Sympathy for Life accomplit la prouesse de ne jamais ennuyer. Ce qui est déjà énorme pour un huitième album.