Sweet Heart Sweet Light

Spiritualized

Domino – 2012
par Michael, le 3 juin 2012
8

Il faut croire que la mort peut faire revivre un homme. En tous cas c'est ce que l'on se dit quand on voit le parcours d'artistes comme Dave Gahan, Josh Homme ou Jason Pierce. Tous trois ont été déclarés, dans des circonstances différentes, cliniquement morts sur un lit d'hôpital avant de décider de faire volte-face au fond du long couloir blanc, sans doute rappelés par la gravité terrestre et par la douce chaleur du soleil d'été ou la saveur du premier café de la journée accompagné de bonnes tartines au beurre salé. Tous trois sont repartis, comme galvanisés par ce bref passage de l'autre côté.

Pour Jason Pierce, on le sent pleinement ici, sur ce nouvel album de Spiritualized. L'excellent Songs in A&E prenait le chemin à l'envers et faisait le deuil (si l'on peut dire) de cette vraie petite mort, comme une tentative d'exutoire. On a encore des frissons en repensant aux sons enregistrés de l'appareil respiratoire de Pierce et aux photos du livret. Sur Sweet Heart, Sweet Light la première impression, c'est que le ton est moins plombé, et beaucoup plus léger, même si par moments le ciel s'obscurcit un peu comme sur le très explicite "Life Is A Problem". Mais "Little Girl", résume assez bien les choses : "Sometimes I wish I was wead, "Cos only the living can feel the pain (...) Hey little girl we're on our own. Here today and then we're gone. Before we ride into the sun. Get it on." Autrement dit, la vie est parfois une belle salope, mais autant profiter du soleil tant qu'il est là. L'album respire donc une forme d'immédiateté quand son prédécesseur donnait dans le réflexif et une construction presque conceptuelle. Ici les bons morceaux s'enchaînent et nous rappellent que la musique est avant tout affaire de plaisir. Plaisir de jouer, plaisir de donner, plaisir d'entendre, plaisir de partager.

Musicalement, le son est toujours aussi ample, dense et cinématique, tel qu'on l'a toujours connu chez l'ex-Spacemen 3. Un son chaud, avec ses inévitables et bienvenues dérives psychédéliques comme sur "Get What You Deserve", "Headin' For The Top Now" ou "I Am What I Am". Mais les perles de l'album, outre le survitaminé "Hey Jane" et son imparable crescendo de 8 minutes 51, ce sont à coup sûr les superbes ballades orchestrées "Mary", "Too Late" et surtout la susmentionnée "Little Girl" et ses délicieux glissando de cordes, comme si les Rolling Stones d'Exile On Main Street s'étaient accouplés avec le Marc Bolan d'Electric Warrior. Et c'est dans ces moments-là qu'on se dit que la vie, c'est quand même quelque chose. En tous cas, avec un album de Spiritualized en bande son, il sera quand même difficile de ne pas apprécier le soleil, le café et ses tartines au beurre salé.

Le goût des autres :
7 Laurent 9 Maxime