Superorganism
Superorganism
Ils sont à peine majeurs, ils ont de la ressource et ils portent le maquillage à paillettes aussi bien que MGMT à leurs débuts. Il n’en suffisait pas plus pour le vent de la hype leur souffle dans la nuque et les expédie dans la grande profondeur sans précaution préalable.
Il faut avouer que leur histoire est un charmant bordel et le résultat sonore à son image. Six gamins éparpillés à travers le monde (Angleterre, Australie, Etats-Unis, Corée) se rencontrent en Nouvelle-Zélande, bredouillent une ébauche de titre dans leur chambrette et le catapultent vers le Japon pour être réceptionné par Orono, connaissance internet de l’un d’entre eux, future chanteuse qui s’ignore et Polly Pocket humaine de 17 ans se transportant aisément dans un sac banane. Se greffe également à la bande un apprenti artiste du nom de Robert Strange. Le récit est mouvant selon les sources et il nous faudra pas mal de temps pour mémoriser les noms (surtout quand on sait que Emily est en réalité un mec et Tucan un grand Coréen chelou) mais l’important, c’est de respecter l’ambition collective.
Donc, voilà, on a fort envie de les pouponner, nos nouvelles mascottes ultra kawaii hyper connectées. Pour commencer, on ne pourra pas leurs reprocher de manquer d’idées ou d’avoir des références qui puent. A la manière d’un atelier bricolage d’élite, ça coupe, ça colle et ça superpose des bouts de Beck, de Avalanches ou de Flaming Lips avec l’enthousiasme d’une bataille de polochons. Par certains aspects, ils rappellent à notre bon souvenir les Anglais de The Go! Team qui, il y a déjà 15 ans de cela, ouvrait leur propre école des fans dans un registre plus électro-funk.
Guidés par la voix faussement lasse de Orono (qui ne cache pas son admiration pour Pavement ou Weezer), on navigue à vue dans de la pop barbe-à-papa, entre virées sous-marines (« The Prawn Song ») et comptines qui ne veulent pas grandir (« Night Time »). Sans recul et sans ironie. Chaque épisode comporte son lot de shebam, de pow, de blop et de wizz. Bienvenue dans leurs comic strips qui permettent l’espace de trois minutes d’oublier qu’on a un patron à satisfaire et une chaudière à remplacer. Bon, à force d’accumuler les garnitures, la pizza palpite un peu dans le plat de l’estomac mais le plaisir en vaut la crampe.
Une fois matérialisée sur scène, la machinerie évoque au mieux la poésie artisanale de Michel Gondry, au pire un spectacle de fin d’année supervisé par un prof de musique sous LSD. Dans tous les cas, c’est le genre de performance feel good qui ne demande qu’à se perfectionner pour honorer le début de l'été. A partir de là, difficile de se prononcer quant à l’avenir d’un tel projet tant celui-ci est lié à la fraîcheur de ses instigateurs. Pourvu que l’euphorie se prolonge et que le château de cartes ne s’écroule pas sous les effets de cette saleté d'âge adulte, sa spontanéité arthritique et son imagination qui bande mou.