Supernature
Goldfrapp
A la voir s’étaler de la sorte dans tous les magazines féminins et/ou un peu branchouilles, on se dit qu’Alison Goldfrapp n’est pas franchement le genre de fille "nature", et encore moins "super nature". On la voit mal traire une vache ou donner à manger aux cochons dans une blouse terreuse. Non, Miss Goldfrapp est plutôt du genre métropolitaine glamour, ultra pomponnée, sophistiquée, en bref, "satin chic", comme le résume si bien le titre d’un des morceaux de ce nouvel album, le troisième depuis Felt Mountain en 2001 et Black Cherry en 2003.
Passons d’ailleurs rapidement sur le titre de cet opus, assez ridicule, voire craignos, aux faux accents de Santana (hem). A l’origine, l’album devait s’appeler Ooh La La, comme le premier single, et n’est-il pas dommage qu’au dernier moment les deux compères, Alison Goldfrapp et Will Gregory, aient décidé de changer d’avis ?
On se souvient qu’à la sortie de Black Cherry, nombreux furent ceux à se plaindre de la mutation musicale de ce groupe, passé des mélodies aériennes à la Ennio Morricone au profit des sonorités dancefloor à la Donna Summer. Pourtant, la cerise noire conserve encore aujourd’hui tout son attrait : sa production excellente, ses morceaux en or massif et, bien entendu, le charme vénéneux d’Alison Goldfrapp la conservent en parfait état de comestibilité. On comprend que Goldfrapp ait donc choisi de poursuivre dans la même veine.
Car à la première écoute de ce Supernature, ceux qui détestaient Black Cherry risquent d’avaler à nouveau leur chapeau, tant ce nouvel album se rapproche de son prédécesseur. Le premier single, "Ooh La La", n’est d’ailleurs rien d’autre que le frère jumeau de "Train". Les trois premiers morceaux (celui précité et "Lovely 2 C U", puis "Ride a White Horse") persistent ainsi dans ce genre néo-disco à forte consonnance sexuelle : rythmes lourds, nappes de synthé dégoulinantes, imagerie kitsch 80s et paroles ouvertement provoc ("Switch me on / Turn me up / I want to touch you / You’re just made for love" sur "Ooh La La") : on est en terrain connu !
Toutefois, dès le quatrième morceau, on s’aperçoit que Goldfrapp a davantage tenté la synthèse de ses deux premiers albums plutôt qu’une redite du précédent. "You never know" renoue en effet avec les sonorités plus vaporeuses de Felt Mountain, comme "Let it take you", qui la suit, ou encore "Time Out from the World", en fin d’album. Ne nous y trompons pas, chacun de ces morceaux est parfaitement maîtrisé et réussi.
C’est pourtant dans le genre disco glam que semble davantage s’épanouir Alison Goldfrapp, en témoigne "Satin Chic", le sommet de l’album, qui lui donne l’occasion de prouver au monde que ses talents ne sont pas que physiques, mais également vocaux. En bref, le nouveau Goldfrapp est un excellent cru, d'ailleurs sublimé par sa magnifique pochette.