Strawberry Jam
Animal Collective
De retour après deux années d'absence discographique, les quatre alchimistes d'Animal Collective avaient fort à faire pour donner un successeur digne de ce nom aux exigeants Feels et Sungs Tongs. Avec Strawberry Jam, la formation de Baltimore est loin de s'emmêler les pinceaux tant le résultat est conforme aux attentes placées dans la bande à Panda Bear. Et si l'engouement pour le groupe va croissant, ce dernier y a sans doute contribué avec un excellentissime Person Pitch ayant, pour rappel, irradié le début de l'année. A l'inverse, son comparse Avey Tare avait, quant à lui, étonné tout son monde début 2007 en publiant, avec sa compagne Kristín Anna Valtýsdóttir (Múm), un album concept pour le moins détonnant puisque enregistré à l'envers. Ainsi, Pullhair Rubeye obligeait l'auditeur à remettre son contenu dans le bon sens pour que l'écoute se révèle un tant soit peu confortable. Toutefois, les véritables têtes chercheuses de ce début de 21ème siècle qui forment Animal Collective se font encore plus passionnantes dès lors qu'elles jouent ensemble. Pour preuve, Strawberry Jam a toutes les qualités requises pour devenir un classique...
N'en déplaise à ceux qui voyaient la pop acoustique de Sung Tongs ou la sensibilité harmonique de Feels comme le summum auquel le groupe pouvait prétendre, Animal Collective s'est une fois de plus autorisé un changement d'orientation musicale en lorgnant cette fois vers des digressions tribales et électroniques. Et à ce petit jeu, le premier single ("Peacebone") ouvrant Strawberry Jam frappe très fort. S'il fait se combiner gimmicks électroniques et attitude pop avant de clore sur un joyeux bordel, le doute s'est quant à lui dissimulé : nous voilà plongés dans une vision acidulée d'une fête foraine dont les tenanciers se nommeraient Avey Tare, Panda Bear, Geologist et Deakin. Alors que l'ombre de Here Comes The Indian (2003) survole les neuf compositions de Strawberry Jam, le collectif du Maryland parvient à nous faire partager son sens de la mélodie complexe sans pour autant mettre à mal son goût pour les rythmes frénétiques. Accouchant d'une oeuvre foisonnante, au point que même les écoutes répétées ne permettent de l'appréhender, Animal Collective sera très certainement l'invité de nombreux classements de fin d'année.
D'un bout à l'autre de l'opus, on s'en prend donc plein les tympans avec cette déferlante de morceaux plus qu'excitants les uns que les autres ("Unsolved Mysteries", "Chores", "For Reverend Green", "Fireworks",...). En tant qu'apôtres du bon goût, les quatre Américains pourraient continuer longtemps dans cette voie qu'on ne se plaindrait pas. Mais on sait déjà qu'ils ne s'arrêteront pas en si bon chemin. En attendant leur retour, on reprendra bien une double dose de confiture à la fraise. Pour notre plus grand plaisir...