Southsiders
Atmosphere
Les années passent et le capital sympathie d'Atmosphere ne s'érode pas. Fort d'une étiquette alternativo-undergroundo-consciente, le groupe de Minneapolis continue à distiller avec régularité des galettes de noble facture vaillamment défendues à coup de tournées internationales et d'événements ultra-locaux autour du shop de leur label Ryhmesayers. Une excellente gestion de carrière qui a permis aux deux comparses de s'installer durablement dans l'indépendance. Mais après autant de temps passé dans la matrice, a-t-on encore quelque chose à dire ?
On a connu Slug punk, alcoolique, père de famille... Et maintenant quoi ? Trois ans ont passé entre The Family Sign et Southsiders. Les deux amis ont pris de la bouteille... et Slug ne l'a jamais quittée. Aujourd'hui encore, il est capable de quelques « punchlines » bien senties à ce propos (« With all due respect to my liver, We tryna get as high as the little dipper ») mais à 40 ans passés, le rappeur semble dépassé par les événement. Le propos perd en unité, en pertinence. Entre la façon dont il raconte la conception de son second fils (le bonus « Idiot »), ses déclarations d'amour à sa femme et ses questionnements métaphysiques de comptoir, on se sent parfois aussi gêné que devant le mur Facebook de tonton.
La « limace » avait habitué les fans à des couplets léchés à multiples niveaux de lecture. L'entendre aujourd'hui passer dans sa « moulinette à chansonnette » quelques refrains aussi pauvres que celui de « The world may not live through the night » arracherait presque une larme (et pas d'émotion) : « Sing a song we will recite/Worked so long to build your life/But it could feel so wrong to feel alright/When the world might not live through the night ». Il serait injuste de juger l'ensemble du disque à quelques mauvaises lignes mais l'impression générale est fortement affectée. Si l'on retrouve sur Southsiders des pistes bien plus denses telles que « January on Lake Street », Slug l'admet sans détour dans son hommage à son ami Eyedea (décédé d'overdose en 2010) sur « Flicker » : « I’m certain if you were here right now, you’d ridicule these lyrics, you’d hate this chorus. You’d probably tell me that the concept is too straight forward. » - pour rappel, il y a six ans, le rappeur filait 3 min 34 de métaphore autour de son père disparu sur le vibrant « Yesterday ».
Bien sûr, l'effort est une nouvelle fois extrêmement bien produit – et peut-être même mieux que les précédents albums. Ant a pris ses aises et l'ajout de musiciens en studio ne fait que renforcer son parti-pris mélodique mais, malheureusement, ça ne fait de Southsiders qu'un album quelconque dans la discographie bien fournie d'Atmosphere.