Somersault

Beach Fossils

Bayonet Records – 2017
par Quentin, le 22 juin 2017
7

Beach Fossils à la base, c'était juste pour permettre à Dustin Payser d'agrandir son terrain de jeu musical. Trop restreint lorsqu'il jouait seul, le New Yorkais décide de recruter le guitariste John Pena, le bassiste Christopher Burke et le batteur Zachary Cole Smith pour créer ce qu'on appelle communément dans le jargon ultra précis du milieu musical, un groupe.

Ensemble, ils mettent en boite leurs premiers singles et un album éponyme, le tout sous la bénédiction de Captured Tracks. On est alors en 2010. 2010, c'est aussi l'année que choisit Burke pour se tailler du projet. Le groupe a alors juste le temps de sortir l'EP What a Pleasure l'année suivante avant que Pena ne se taille pour former Heavenly Beat (qui?). Etant donné le succès qui entoure le groupe lorsque tout porte à croire qu'il s'écroule de l'intérieur, Cole Smith prend les devants et se taille pour créer DIIV. Rentrent alors en scène Tommy Gardner et Tommy Davidson, les sauveurs qui permettront à Beach Fossils de perdurer et surtout de sortir le très bon Clash The Truth en 2013. Un mouvement audacieux qui permettra aux New-Yorkais de se retrouver associés à la vague dream pop qui inonde jusqu'à la saturation le secteur musical à ce moment-là, tout en restant au-dessus du lot - en comparaison avec Wild Nothing  ou Real Estate par exemple. Mais alors que les deux groupes susnommés peinent à retrouver un second souffle sur leurs dernières sorties, Beach Fossils livre le très beau et très léger Somersault. Et comme toute sortie de Beach Fossils, elle est accompagnée du départ d'un de ses membres, et cette fois c'est Tommy Gardner qui s'y colle (au profit de Jack Doyle Smith). 

Somersault arrive donc 4 ans après Clash The Truth, soit une éternité dans le monde musical. Et à défaut d'avoir eu raison d'attendre (on ne nous a pas vraiment laissé le choix...), on se dit que le résultat aurait pu être dramatique comparé à ce que l'on a écouté. Première info, l'indie pop de Beach Fossils est évidemment toujours là, intacte. A la seule différence que l'angle d'approche à changé. Le côté amer, tendu, "post quelque chose" de l'album précédent s'est évaporé au profit d'une ambiance plus lumineuse qui tend même parfois vers des sonorités sixties - on pense à l'intervention géniale de ce saxo jazzy sur plusieurs titres.

Là où Beach Fossils se démarque d'une scène musicale centrée sur elle-même et au sein de laquelle la fripe semble avoir pris le pas sur l'originalité, c'est que les gars de Brooklyn n'ont jamais perdu de vue l'importance de vraies compositions. Pendant que nombre de leur contemporains se contentent d'une boîte à rythme binaire, une ligne de basse répétitive et un riff' de guitare épuisant avant même que le morceau soit fini, Beach Fossils emmène son projet et son public un pas plus loin.

La place grandissante de l'expérimentation trouve son origine d'une part dans la place que Payseur laisse à son groupe dans la composition de l'album et d'autre part dans les invités qu'il choisit pour contribuer à leur création. Rachel Goswell (Slowdive) apparaît sur le titre "Tangerine", donnant une nouvelle dimension aux sonorités du groupe alors que le rappeur de Memphis Cities Aviv transforme Beach Fossils en backing band sur "Rise". Le pari est audacieux, d'autant qu'il est quasi inattendu de leur part mais surtout, le pari est réussi et rend Somersault encore plus éclectique. Preuve que parfois, partager sa vision peut s'avérer payant.

Ce qui reste le plus surprenant, c'est que Somersault garde cette apparence tranquille et facile propre à Beach Fossils. Sans jamais s'embarquer dans des arrangements qui, soyons honnêtes, ruinent la plupart des compositions pop indie actuelles, Beach Fossils pousse son art au-delà de ses limites. A l'instar de Mac DeMarco ou DIIV avant eux, Beach Fossils a émergé de la brume de Captured Tracks pour forger sa propre identité. Longue vie à eux !

Le goût des autres :
6 Maxime