Sick Travellin'
Fritz Kalkbrenner
On le disait déjà au moment de parler du prometteur Here Today Gone Tomorrow : chroniquer un album de Fritz Kalkbrenner sans faire référence au travail de son frère aîné est non seulement une tâche peu aisée, mais relèverait en outre de l’absurde tant les intersections entre les deux sont nombreuses et contribuent à définir le son de la fratrie Kalkbrenner. Car c’est bien de cela qu’il s’agit, et qui est en réalité l’intérêt principal de cette seconde plaquette du cadet, intitulée Sick Travellin’ : elle fait passer au statut de certitude ce qui n’était qu’une intuition et achève de convaincre que, s’il est aisé de reconnaître le son d’un Kalkbrenner balancé au milieu d’un set de minimale par un DJ routinier ou à la fin d’un vieux blind-test, il est devenu nettement plus compliqué, au cours des dernières années, de distinguer les productions respectives de Fritz et de Paul.
Seule la voix, on l’a déjà dit également, permet véritablement de faire le départ entre les deux frères : chaude, mélodieuse et hypnotique, celle de Fritz a offert au frère aîné un succès mondial avec « Sky and Sand » et portait, sur Here Today Gone Tomorrow, le remarquable « Facing the Sun ». Sur Sick travellin’, elle gagne en présence et contribue à l’effet favorablement sédatif de « Get a Life », « No Peace of Mind », « Little by Little » et « Can’t Stand the Fire ». Ces titres plutôt réussis, pourtant, ne sont jamais novateurs et Fritz Kalkbrenner donne l’impression d’éprouver quelques difficultés à innover. On déplorait déjà quelques longueurs sur Here Today, et elles se confirment ici, malgré l’élagage bienvenu des interludes inutiles qui émaillaient le premier album. Trop de titres, comme « Chequer Heart Day », « By Any Means » ou « Brumaire » semblent un peu superflus, anonymes, et on se dit qu’ils auraient tout aussi bien pu se retrouver à la place d’« Azure » ou « Square 1 », ces tracks oscillant entre deep house et minimale qui paraissaient faire office de pause respiratoire et de jointure sur la B.O. de Berlin Calling, voire se substituer à la plupart des morceaux composant le très dépouillé Icke wieder.
On ne va pas, pour autant, faire le procès des frères K, et certainement pas celui de ce Sick Travellin’. Prévisible et sans progrès notable par rapport à la première plaquette du cadet des natifs de Leipzig, cet album n’en est pas moins une B.O. valable pour afters et lendemains de veille difficiles, qui se laisse écouter sans passion et révèle en douceur ses vertus parégoriques. On s’en satisfera pour l’instant, en attendant de retourner à l’occasion voir Fritz où il se débrouille le mieux, c'est-à-dire en live, pour lui offrir la possibilité de vraiment nous retourner.