Siberia
Echo & The Bunnymen
Appelez ça scepticisme, réflexe de Pavlov ou mauvais esprit, mais quand un groupe de vétérans crie à qui veut bien l’entendre, à l’occasion de la sortie de son nouvel album, qu’il a retrouvé sa créativité, sa fougue et son écriture d’il y a 20 ans, il est plus facile de rire ou de fuir que de le prendre au sérieux. Usée jusqu’à la corde et servie à toutes les sauces pour des résultats souvent minables, cette rengaine est sans doute aujourd’hui la pire des choses à utiliser pour faire la promotion d’un disque. Il en va de même pour Siberia, quatrième album d’Echo & The Bunnymen depuis la reformation du groupe en 1997, annoncé dans la presse comme « leur meilleur depuis Ocean Rain ». Ben voyons ! Ce dernier étant rien de moins que LE chef-d’œuvre du groupe, et l’un des plus grands disques des années 80, il est évident que le fan comme l’auditeur occasionnel allait attendre Ian McCulloch et Will Sergeant au tournant.
Cette déclaration à l’emporte-pièce est d’autant plus étrange que si le doublé gagnant de Evergreen et What Are You Going To Do With Your Life ? avait fait du retour des hommes lapins l’un des rares come-back réussis de l’histoire de la pop, le triste Flowers paru en 2001 a coupé net la dynamique du groupe. Alors qu’en est-il quatre ans et un album solo du Mac (Slideling) plus tard ? D’abord, le retour derrière les consoles de Hugh Jones, producteur de Heaven Up Here en 1981 (!), est plutôt une bonne chose. Si le choix était sans doute plus dû à la nostalgie qu’à autre chose, Echo & The Bunnymen y gagne néanmoins en concision et en relief. Des titres comme "Stormy Weather" et "All Because Of You Days", d’un classicisme à toute épreuve, s’en sortent plutôt bien. Idem pour les ballades, "Everything Kills You" et "What If We Are" en tête.
Le problème du disque sur la longueur est qu’à force de regarder dans le rétroviseur, le groupe finit par s’autoparodier. Ian McCulloch a beau chanter comme un ange déchu, Will Sergeant a beau triturer ses guitares, il n’en reste pas moins que "In The Margins" pique la rythmique de "Bedbugs & Ballyhoo" et que le refrain de "Of A Life" repompe celui de "Over The Wall". Soyons néanmoins bon prince : Siberia est un disque agréable à écouter, un peu poussif par instants, mais plus consistant que nombre de productions actuelles vendues sous le label du renouveau de la pop (ou du rock, on ne sait plus où commence l’un et où s’arrête l’autre) britannique. Mais de là à faire des comparaisons avec Ocean Rain… Mieux vaut en rire !