Saddiction

Hangman's Chair

Nuclear Blast – 2025
par Guigui, le 9 avril 2025
8

Dire qu’on n’appréhendait pas la sortie de ce nouvel album de Hangman’s Chair aurait été un vilain mensonge. Si à aucun moment nous n’avons douté des Parisiens, le récent parcours impeccable de la formation n'empêchait pas certains questionnements. Dit comme ça, le propos peut paraître étrange : craindre le nouveau disque d’un groupe dont on ne doute pas du talent n’est pas banal. On s'explique.

Ces dernières années, Hangman’s Chair a bien grandi, faisant évoluer son hardcore sludge qui sentait bon la weed et le bitume bouillant vers des territoires doom plus raffinés. Une progression qui a permis au groupe de sortir en 2022 un petit chef-d’œuvre intitulé A Loner, sur lequel il ajoutait une dimension nouvelle à sa musique en fricotant avec des sonorités coldwave - une mue impeccablement gérée qui allait lui ouvrir les portes du rouleau compresseur allemand Nuclear Blast.

Étant habitués à l'audace des Français, notre seule crainte était de voir le groupe céder à la facilité et réciter poliment ses gammes. En prélude à la sortie de l'album, on avait pu se mettre sous la dent « 2AM Thoughts » et « Kowloon Lights »,  des singles qui nous avaient convaincus que la formation souhaitait tenir sa ligne de conduite sans se répéter bêtement. Mais des singles restent des singles et le risque que ceux-ci ne soient que coups dans l'eau était réel.

Dès l’entrée en matière « To Know the Night », on perçoit une forme de changement dans la continuité. Si l’esprit reste, un travail sur le son de guitare se fait rapidement ressentir. Les riffs sont toujours aussi lourds mais ceux-ci semblent dépasser un peu plus les contours du dessin pour apporter davantage de gras là où les morceaux d’il y a trois ans se caractérisaient par leur (relative) propreté. Ce genre de détails se ressent également sur « In Disguise » où la basse dégueule véritablement. Mais ce qui surprend plus est le travail qui semble avoir été accompli sur la voix de Cédric Toufouti. Ses performances vocales ne souffraient pas la critique mais il semblerait qu’ici, le chanteur ait voulu monter encore d’un cran et développer un aspect plus poussé (sans être poussif) dans le but de colorer les compositions d’un coffre qu’on ne lui connaissait pas encore jusqu’ici.

Passé encore une fois entre les mains du gourou Francis Caste (Celeste, Regarde les hommes tomber), Saddiction est un recueil de morceaux aussi puissants qu’éthérés dont la beauté triste touche l’auditeur au plus profond de son âme comme sur « Canvas » ou la synthèse que représente le titre de clôture « Healed ? ». En un mot comme en cent, ce dernier album se présente comme une démonstration que certains groupes font encore parler leurs émotions avec une grande sincérité.

Le goût des autres :