Rules
The Whitest Boy Alive
2009, année Erlend Øye? En tout cas, le rouquin bigleux ne semble pas ménager ses efforts pour que cette année n'oublie pas combien il est un artiste complet et pétri de talent. Ainsi, s'il faudra attendre encore quelques mois avant de pouvoir juger le très attendu (5 ans quand même!) nouvel album des Kings of Convenience, on peut d'ores et déjà se mettre sous la dent Rules, le second album de son projet The Whitest Boy Alive. Exilé à Berlin où il a recruté les trois acolytes qui forment désormais son groupe, Erlend Øye donne dans ce que certains n'hésitent pas à appeler du 'slacker funk' – du funk de glandeurs. Si la création de genres aux noms aussi extravagants qu'insignifiants (4x4 garage? Blackened Death Metal?? New Rave???) a de quoi exaspérer, il faut bien avouer que cette appellation colle à merveille aux aspirations musicales du filiforme Norvégien tant il se dégage de la musique du quatuor une impression de je-m'en-foutisme complètement jouissive.
Pour ce second effort, le trio est devenu quatuor puisque le claviériste Daniel Netnwig occupe désormais une place à part entière dans l'organigramme. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que cela s'entend. Alors que Dreams était un album aux contours rugueux, qu'une structure simple guitare-basse-batterie parvenait néanmoins à emmener vers des sommets de groove capiteux, son successeur a troqué son t-shirt blanc contre une belle chemise à fleur qui évoque l'amour du groupe pour le soleil du Mexique, où une bonne partie du disque a été enregistré.
Mais en bons fashionistas que vous êtes, vous savez aussi bien que moi que ce vêtement, au même titre que le legging fuchsia ou le sous-pull en lycra jaune, ne se porte pas facilement et peut rapidement faire passer son propriétaire pour le dernier des nazebroques en cas d'association malheureuse. Et c'est précisément le danger qui pendait au nez de The Whitest Boy Alive et que des premières écoutes circonspectes semblaient confirmer: les synthés, tantôt jazzy, tantôt italo-disco, occupaient une place un peu trop prépondérante, allant souvent jusqu'à donner le tempo du morceau et éclipsant Erlend Øye.
D'ailleurs, il m'aura fallu une bonne dizaine d'écoutes pour arrêter de me focaliser sur ces notes omniprésentes de clavier et prêter également l'oreille à ce qui fait finalement la force du groupe: l'écriture tout en souplesse et en délicatesse d'un Erlend Øye qui nous livre en fait avec Rules le genre d'album qui ne devrait pas vous quitter d'une semelle avec le retour des jours ensoleillés. Rond là où son prédécesseur était carré, Rules est un disque dont l'atout principal reste la force tranquille – incarnée notamment par la voix douce et parfois suave de son créateur. Axé dancefloor sans avoir recours à des basses écrasantes ou des filtres scandaleux, ce nouvel opus est une réussite totale, enchaînement parfait de tubes exécutés avec une nonchalance de façade et ce talent qu'on connaît à Erlend Øye depuis déjà quelques années. Alors, 2009, année Erlend Øye? En tout cas, avec Rules, c'est bien parti…